L’Oeuvre. N°
du 4 juin 1943
J.-J.
Rousseau portait aussi des semelles de bois !
Les semelles de bois ! Nous rappelions, voilà quelques jours que ce n’était pas une découverte du vingtième siècle.
Un lecteur, M. Dutheil nous signale que J.-J. Rousseau en portait à Ermenonville. Et ces chaussures, qu’on pouvait encore voir au début du siècle, on les appelait les « sabots de Rousseau ». Ils possédaient une semelle de hêtre épaisse avec large talon. La monture était de paille de seigle, cousue à grands points au moyen d’une ficelle. Le devant de la semelle, presque arrondi, présentait une pointe très obtuée et se relevait un peu à la manière des babouches.
Rien de nouveau, n’est-ce pas sous le soleil de 1943 ? C’est bien ce que nous décorons du nom de « chaussures sans ticket ».
Ajoutons que les sabots de Jean-Jacques étaient de la pointure trente-huit, quant à la semelle, mais que la paille en était pas mal avachie, ce qui indiquerait que notre philosophe avait un petit pied, et que s’il voyait dans la société humaine l’effet d’une contrainte, il refusait cependant de l’infliger à ses orteils.
Et, pourtant, il ne voulut pas se rapprocher de l’état de nature au point de marcher pieds nus…
Sans le lui reprocher, comment ne pas penser à ce jugement d’un historien du début du vingtième siècle qui disait :
Le sauvage libre de Rousseau n’est pas un vrai sauvage ; c’est un philosophe qui s’est mis tout nu.
Texte numérisé par Pascale
Pellerin