Autographes
- Livres - Dessins
&
Photographies
DÉCEMBRE 2011 - JANVIER 2012
Saint-Pol-Roux :
Poème autographe signé.
LIBRAIRIE
WILLIAM THÉRY
1 bis,
place du Donjon
28800 -
ALLUYES
Tél. 02 37 47 35 63
E.mail : williamthery@wanadoo.fr
1.- [Paul ADAM] Photographie
originale, format cabinet (9,5 x 13,5 cm) contrecollée sur carton ;
cliché Henri Manuel, Paris. Envoi a. s. : « A mon très cher ami Pierre Fons avec tous mes vœux de gloire.
Paul Adam. » 100 €
2.- Emmanuel Armand de Vignerot
du Plessis, duc d’AIGUILLON [1720-1788], maréchal de camp et homme d’Etat,
secrétaire d’Etat de la Guerre de Louis XV. LS, Versailles, 31 mai 1774, au
chevalier de Boislogé, capitaine en
second à Charleville ; demi-page
in-folio. Ordre de mission : « indépendamment
du service dont vous êtes chargé à la Manufacture
de Charleville, le Roy a jugé à propos de vous employer aussy aux détails
des forges de la Champagne. Vous
exécuterés dans cette nouvelle destination tout ce qui vous sera prescrit par
M. Dangenoult, chargé de la
Direction de ces forges et de toutes celles qui sont affectées à
l’Artillerie. »… 50 €
LA PREMIÈRE TRADUCTION
FRANÇAISE
DU PREMIER CHAPITRE DU CRÉPUSCULE DES IDOLES (1899)
3.- Henri ALBERT [1868-1921],
écrivain, premier traducteur de Nietzsche en langue française. Manuscrit autographe signé, Maximes et Pointes, traduction
d’aphorismes de Nietzsche ; 6 pp. ¼ in-4°, tampon du Mercure de France à la date du 12 mai 1899. Une note au bas de la
première page précise que ces 44 aphorismes forment le « chapitre premier du Crépuscule des Idoles (1888), volume
dont la traduction est sous presse ». Extraits : « 1. La paresse est le commencement de
toute psychologie. Comment ? La psychologie serait-elle un… vice ? –
3. Pour vivre seul il faut être une bête ou bien un dieu — dit Aristote. Il
manque le troisième cas : il faut être les deux choses réunies, il faut
être — philosophe… - 7. Comment ? l’homme ne
serait-il qu’une méprise de Dieu ? Ou bien Dieu ne serait-il qu’une
méprise de l’homme ? – 20. La femme parfaite commet de la littérature
comme elle commet un petit péché : pour essayer, en passant, et en
tournant la tête pour voir si quelqu’un s’en aperçoit et afin que quelqu’un
s’en aperçoive… - 26. Je me méfie de tous les gens à système et je les évite.
La volonté du système est un manque de loyauté. – 31. Le ver se recroqueville
quand on marche dessus. Cela est plein de sagesse. Par là il amoindrit la
chance de se faire de nouveau marcher dessus. Dans le langage du monde : l’humilité.
– 33. Combien peu de chose il faut pour le bonheur ! Le son d’une
cornemuse.— Sans musique la vie serait une erreur.
L’Allemand se figure Dieu lui-même en train de chanter des champs. – 34. On
ne peut penser et écrire qu’assis (G. Flaubert). — Je te tiens là,
nihiliste ! Rester assis, c’est là précisément le péché contre le
Saint-Esprit. Seules les pensées qui viennent en marchant ont de la
valeur. – 39. Le désillusionné parle. — J’ai cherché des grands
hommes et je n’ai toujours trouvé que les singes de leur idéal.»… L’autodafé de la veuve d’Henri Albert a
rendu ses manuscrits rarissimes. 300 €
4.- Marcel AYMÉ [1902-1967],
écrivain. Manuscrit autographe signé
d’un article, Adaptation, s.d. [circa
1955] ; 1 p. ½ in-4°, 50 lignes de sa fine écriture serrée. Intéressante
réflexion sur le problème posé par l’adaptation d’une œuvre étrangère, inspirée
par une expérience personnelle : l’adaptation de la pièce d’Arthur Miller,
The Crucible, devenue en français Les Sorcières de Salem. « Avant d’en
avoir l’expérience, commence-t-il, je
croyais que le travail de l’adaptateur consistait en tout et pour tout à transcrire
la pièce d’un auteur étranger dans un français honnête et, autant que possible,
capable de passer la rampe. […] J’imaginais
que de légers gauchissements d’expression pouvaient suffire à transporter d’un
continent à l’autre le contenu d’une réalité dramatique. J’ai compris mon
erreur quand j’ai commencé mon travail sur the Crucible […] d’Arthur Miller. Dès le départ, je butais
sur une situation théâtrale périlleuse pour l’adaptateur et qui m’était apparue
à première lecture sans toutefois m’alarmer autant qu’elle le méritait. » L’argument
est connu : en 1690, un fermier américain séduit sa jeune servante avant
de la renvoyer. La jeune fille se livre alors à des pratiques de sorcellerie
pour reconquérir son amant. « Dans
l’œuvre de Miller, aucun doute n’est possible : la sympathie du spectateur
américain est acquise au séducteur. […] Il
n’a qu’à entrer sur une scène de Broadway ; il est comme drapé dans la
bannière étoilée et le public, le cœur gonflé de tendresse et de fierté, le
dévore déjà des yeux. En face de ce prestigieux grand ancêtre, la fille qui
s’est donnée à lui avec tant de ferveur n’est plus qu’une petite salope qui
vient ternir l’aube glorieuse des U.S.A. Pire, elle est l’image haïssable du
péché. » Le spectateur français ne réagira pas de la même manière. « En France, il faut bien le dire, on
ne lit pas beaucoup la Bible. […] Ce
puritain trousseur de jupon, qui ne rêve qu’à retrouver la paix de son ménage
et ses chances de paradis, ne peut manquer d’être mal vu chez nous, et la
sympathie, tout naturellement, ira d’abord à la fille séduite et par-dessus le
marché orpheline, j’oubliais de le dire. » Marcel Aymé a donc dû
procéder à un rééquilibrage des personnages pour être fidèle à l’esprit de la
pièce originale et il s’est employé à « noircir
la victime en lui prêtant un machiavélisme qu’elle n’a pas dans la pièce
d’Arthur Miller où elle est amenée, pour défendre sa vie et dans l’entraînement
d’un délire collectif, à déclencher la chasse aux sorcières. » « J’ai
voulu, explique-t-il, lui donner la
pleine conscience du mal qui est en elle. Ce faisant, j’ai sans doute beaucoup
contrarié l’auteur et je le regrette sincèrement. » Manifestement,
Marcel Aymé n’a pas conservé un excellent souvenir de cette expérience
littéraire car son article se termine sur la ferme résolution qu’on ne l’y
reprendra plus : « je veux être
pendu comme une simple sorcière s’il m’arrive jamais de refaire une
adaptation. » 400 €
— [BÉRANGER] Voir Henri Sauguet.
5.- Louis BLÉRIOT
[1872-1936], ingénieur et pionnier de l’aviation. Carte postale représentant le monoplan Blériot VIII bis signée et datée (11 juillet 1909),
format 8,8 x 13,8 cm. — On joint :
Une autre carte postale montrant un aéroplane Blériot évoluant dans les
plaines de Beauce sous l’œil étonné de trois paysans aux champs. 120 €
AUTOUR DU DUEL DE JULES BOIS
ET VINCENT D’INDY
6.- Jules BOIS [1868-1943],
poète, romancier et auteur dramatique, on lui doit de nombreux ouvrages sur les
sciences occultes. Manuscrit autographe
signé, s.d. [fin 1907 – début 1908] ; 1 p. in-4°. Violents propos
contre Vincent d’Indy qui, après avoir accepté de mettre en musique Hippolyte couronné, mit un terme à sa
collaboration. Le différend fut porté à la connaissance du public par les deux
hommes qui s’injurièrent d’importance dans Comoedia
jusqu’à rendre inévitable le duel au pistolet qui eut lieu le 11 janvier
1908, au petit matin, au Parc des Princes. Aucune goutte de sang ne fut versée.
Le manuscrit que nous proposons est probablement celui d’une des diatribes
adressées par Jules Bois au musicien dans les colonnes de Comœdia. Extraits : « J’ai
cru à la parole de M. Vincent d’Indy ; je me suis trompé lourdement, aussi
lourdement que cet homme jadis grave plaisante, aussi lourdement qu’il a tort.
A propos d’Iphigénie, par un acte d’injustice et d’ingratitude, il a mis
son honneur à se délivrer d’un engagement pris avec M. Albert Carré et
avec moi. […] Je conseillais à M.
Vincent d’Indy d’écrire un Tartuffe. C’est trop pour lui. Il
défaillirait encore. Mais il lui reste du champ pour fuir. Bazile c’est à sa
taille ; il nous donnerait la variante wagnérienne de l’air de la
calomnie. Si l’on baille, il aurait la ressource d’adapter en musique le style
guilleret de ses lettres. »… — On joint : Jules BOIS, Hippolyte couronné. Drame antique en 4
actes en vers. Portrait de l’auteur par Albert Besnard en frontispice. Paris,
Librairie Charpentier et Fasquelle, 1904. In-12 br. 168 pp. 120 €
7.- Pierre BONNARD [1867-1947],
peintre et graveur. Carte postale a. s., [Paris, 10
juillet 1947], à Pierre Marchal ;
1 p. in-12. Carte adressée à un collectionneur d’autographes : « Autographe certifié authentique. P.
Bonnard. » 140 €
8.- René Tardiveau dit René BOYLESVE [1867-1926], écrivain. LAS, 21 mars 1919, à un confrère ;
1 p. in-8°. Remerciements et évocation du passé. « Je pense que la conversation protocolaire d’hier, dans la
vieille maison du quai, entre deux hommes certainement attachés à vous par le
souvenir de débuts et surtout de mœurs littéraires identiques vous a donné à
entendre — avec les noms de Schwob,
de Tinan, de Hugues Rebell, de Remy de
Gourmont — qu’il se passe dans ce petit coin du monde quelque chose de
nouveau. »… 60 €
9.- Charles Edouard BROWN-SÉQUARD
[1817-1894], physiologiste et neurologue, professeur au Collège de France
[Acad. Médecine et Acad. Sciences]. LAS,
Sainte-Adresse, 9 juillet 1892, à Mme
Raffalovitch ; 3 pp. in-12. Il la remercie pour les renseignements
qu’elle lui a fournis sur Ouspensky : « Ses
travaux ont le caractère scientifique, mais il aurait pu néanmoins être de ces
médecins de valeur réelle, qui sont pourtant des charlatans. » Il la
remercie également pour l’envoi d’un numéro du journal russe le Nouveau Temps : « Il me servira
assurément beaucoup dans ce moment précisément où je travaille à un livre sur
le sujet du Feuilleton scientifique dont vous voulez bien me parler. » Il
enverra à ce journal un exemplaire des articles qu’il a publiés avec son
assistant Arsène d’Arsonval (1851-1940) « sur
le mode de préparation des liquides
organiques (non seulement de celui dont j’ai proposé l’emploi, mais aussi
de plusieurs autres, qui sont très importants). Les appareils si précieux, — si essentiels — de stérilisation & de
filtration, dus au génie de d’Arsonval, permettent maintenant l’emploi des
liquides organiques divers en toute sécurité, et, comme nous l’avons prouvé, on
peut les injecter sous la peau et dans les veines. »… 180 €
10.- Thomas-Robert BUGEAUD (1784-1849),
maréchal de France, duc d’Isly. LAS,
Alger, 3 juillet 1845, au maréchal
Soult, ministre de la Guerre ; 2 pp. ½ in folio, en-tête Direction des Affaires de l’Algérie. Au
sujet de la réduction des effectifs des troupes indigènes pour réaliser
l’économie de 2.400.000 francs souhaitée par le ministre. Bugeaud et Lamoricière partagent le même point de
vue : « Comme moi il considère l’infanterie indigène actuelle
comme une force réelle. On tire, dit-il,
du baton de tirailleurs de Mostaganem le même parti que d’un baton
fais sauf qu’on ne peut pas le faire travailler, et il émet l’idée
de transformer ces bataillons en zoâves. (…) Je propose en définitive de transformer les trois batons de
tirailleurs en un régiment de zouaves à trois bataillons, composés chacun
d’autant de compies qu’il y a actuellement de compies
de tirailleurs. Ces bataillons
resteraient chacun à sa place jusqu’à ce
que les indigènes se fussent éteints, ce qui ne serait pas long, après quoi le
régiment serait rallié dans la province de Constantine qui n’a aucun corps
spécial et d’élite, en infanterie. (…) Les
zoâves seraient recrutés parmi les hommes de bonne volonté de tous les
régiments d’infie d’Afrique et de France, car il faut que ce soit un
corps d’élite et tout le monde a remarqué que le 1er
régiment a beaucoup perdu de sa valeur depuis qu’il est recruté par les appels.»…
— Joint : Minute de la réponse du maréchal Soult, dictée le 10
juillet 1845 ; 1 p. in-4° à l’encre rouge, en-tête Ministre de la Guerre – Cabinet du Ministre. « Les réductions
proposées par le Gal Lamoricière peuvent avoir lieu & produiront
une certaine somme. Quant à la transformation des bataillons de tirailleurs
indigènes en régiment de Zouaves, je me suis assez expliqué à cet égard, à
diverses reprises, pour que je croie inutile d’en reparler. Ces bataillons doivent être maintenus, par
la raison qu’il n’entre dans leur composition que des soldats indigènes tandis
que ceux du régiment de Zouaves sont français. »…
300 €
HENRI MONNIER VU PAR
CHAMPFLEURY
11.- Jules Husson dit CHAMPFLEURY
[1821-1889], écrivain, administrateur de la Manufacture de Sèvres. LAS, Sèvres, 7 mai 1877 ; 1 p.
in-8°, en-tête Ministère de l’Instruction
Publique et des Beaux-Arts – Manufacture nationale de Porcelaine. Il envoie
à son correspondant ses articles sur Henri Monnier. « Quoique je ne sois pas toujours un complaisant pour cet
humoriste remarquable, il m’a paru que les deux derniers chapitres seuls
pouvaient intéresser les membres de l’Académie. Ils révèlent une nouvelle face
de l’homme ; ils montrent ce que fera sa femme et plus je pénètre dans le secret de sa vie difficile, plus elle me semble
digne d’intérêt. »… 75 €
LES LOISIRS GÉNÉALOGIQUES D’UN
MINISTRE DE LA GUERRE DE NAPOLÉON
12.- Henri-Jacques-Guillaume
CLARKE [1765-1818], général de la Révolution et de l’Empire, maréchal de
France, ministre de la Guerre de Napoléon 1er. LAS, Saint-Cloud, 11 juin 1806, à Armand-Samuel de Marescot, inspecteur général du Génie (1758-1832) ; 2 pp. ½ in-4°, adresse (petit
manque au second feuillet sans perte de texte suite au bris du cachet de cire).
Curieuse lettre de généalogie au sujet de l’ascendance de Marescot : « j’ai comme vous le savés beaucoup de
répugnance à croire à l’origine italienne dont vous m’avés parlé et je
tomberais plutôt d’accord avec vous sur une origine normande ou
vendômoise. » Il a lu dans le Peerage
of Ireland que « Theobald II ou
Thierry Butler […] épousa Jeanne,
cohéritière avec son frère, et sœur aînée de Jean de Marreis (de Marisco) […]
qui était un des barons les plus
considérables de l’Irlande, dont les biens, soit en Irlande, soit en
Angleterre, furent possédés par ses descendants. Or, il se trouve que
lui-même descend de cette Jeanne de Marisco. Il cite à la suite plusieurs autres
passages du Peerage of Ireland censés
aider Marescot dans la quête de ses racines : « Vous voilà sur la voye de ces de Marisco. Avec un peu
plus de recherches vous en saurés davantage. »… 160 €
UNE RENCONTRE
INATTENDUE : JEAN COCTEAU ET JULES LEMAITRE
13.- Jean COCTEAU [1889-1963],
écrivain. LAS, [août 1915], à Mlle Pauline Beer ; 4
pp. pet. in-4° écrites à l’encre violette sur papier
vergé bleu (petites fentes au pli). Belle lettre dans sa graphie de jeunesse sur
la mort de Jules Lemaitre. « Je ne
saurais vous dire quel [sic] triste
joie vous me faites avec ce cher profil. Le
14 juillet 1915 m’a serré le cœur pour bien des raisons mais surtout je pensais
à la place de la Bastille, aux 4 sergents de la Rochelle, à monsieur Lemaitre
qui dansait comme à 15 ans. Tavers, les fraises, la crème, les cerneaux,
hélas, il faut se résoudre à comprendre que plus
jamais une si grande douceur. Ce qui
console un peu c’est l’immonde spectacle dont la mort soulage les justes. »… 320 €
14.- Maurice DENIS [1870-1943],
peintre, graveur et décorateur. LAS,
Paris, 4 mars [1936 ?] ; 1 p. in-8°, en-tête Musée Gustave Moreau. Il se dit désolé de ne pouvoir assister à la
réunion fixée par son correspondant le 14 mars : « je pars dimanche prochain pour mettre en place à St-Etienne une décoration
que je viens de terminer. J’y suis engagé par contrat. » [Il s’agit probablement
de la salle de réunion de l’Hôpital de la Charité]. Il lui conseille toutefois de ne pas différer la réunion, estimant
que sa présence n’est pas indispensable. Il sera de retour le 26 mars. « Je
serais heureux de prendre part à la lutte qu’il va falloir soutenir contre la
tyrannie d’un pouvoir stupide et ennemi des arts et de toutes les libertés. »…
Il verra samedi à l’Institut le peintre Georges Desvallières, avec qui il avait
fondé en 1919 les Ateliers d’Art Sacré. Ami de Gustave Moreau, Desvallières
devint le conservateur de son musée en 1930. 300 €
15.- Théodore DUBOIS
[1837-1924], compositeur. Manuscrit
autographe signé : A propos de ce
qu’on appelle : Les Wagnériens, article publié dans la
revue musicale de l’Ordre le 11 mai
1882 ; 10 pages in-8°. Théodore Dubois aborde le sujet qui semble diviser
en deux le monde musical, au grand ébahissement des profanes : Wagner. « Aux yeux de ceux qui se disent ou se
croient wagnériens, tous les autres ne sont que d’affreux rétrogrades,
pour lesquels ils professent le plus profond dédain. Les soi-disant rétrogrades
éprouvent, de leur côté, un certain éloignement pour ceux qui affichent
exclusivement des opinions wagnériennes ; ceux-ci étant généralement gens très
passionnés et conséquemment fort peu tolérants, il s’ensuit que la discorde
règne précisément là où devrait régner l’harmonie. […] il faut, pour être admis dans le cénacle, répudier tout ce qui a été fait
avant la venue du Messie. C’est justement ce que ne comprend point du tout le
vulgaire profane en entendant, dans certains milieux, traiter les œuvres de
Haydn, de Mozart, de Rossini, etc…, de platitudes, quand le mot n’est pas plus
fort. On ne s’attaque pas encore beaucoup à Beethoven, mais cela viendra. »
Mais les artistes ne profitent-ils pas toujours de ceux qui les ont
précédés ? « Sans Haydn et
Mozart, aurions-nous eu Beethoven ? Sans
Bach, aurions-nous eu Mendelsohn et Schumann ? Sans Gluck, aurions-nous eu
Spontini, Weber, Berlioz et Meyerbeer ? et sans
tous ceux-là et bien d’autres encore, aurions-nous aujourd’hui Wagner, en qui
on personnifie la dernière incarnation du génie musical moderne ? On
sait que Wagner, dans son orgueil, renia toute filiation : — il n’a
cependant pas inventé la musique à lui tout seul. Il veut ajouter une pierre à
l’édifice : nous croyons qu’il l’ajoutera, mais l’édifice existait. […]
Nous proclamons hautement que Wagner est
un homme de génie ; nous admirons nombre de ses œuvres autant que
personne ; nous reconnaissons la puissance de sa conception, la grande
élévation de sa pensée et sa prodigieuse faculté d’instrumentation ; nous
ne pouvons donc être suspect en cette question. » Ce que Dubois
réprouve, c’est l’intolérance et le sectarisme de ses disciples. Wagner s’étant
affranchi des règles et de la forme qui prévalaient
jusqu’à lui, il estime que « cela
est très commode pour messieurs les ignorants de n’avoir plus à se préoccuper
ni des règles, ni de la forme, ni de rien. Il est en outre très
facile de ne pas être banal en étant bizarre. Dès lors, rien n’est plus simple
que de faire de la musique dite avancée : il n’y a qu’à oublier tout ce
qu’on devrait savoir, à écrire des choses qui n’ont aucun sens, et le tour est
joué ; on est porté aux nues par la coterie… » Théodore Dubois
prêche pour la liberté et la variété de l’art, avouant reconnaître le génie de
Wagner tout en refusant de lui laisser inféoder sa propre création musicale. « Sans compter que l’épithète de
Wagnérien ne signifie rien, ou du moins rien de précis. Si on entend par être
Wagnérien aimer la musique de Wagner, nous le sommes, car nous l’aimons et
admirons beaucoup quand elle nous paraît belle, […]. Mais non, en entend par là, aimer certaine musique plus ou moins bonne
ou plus ou moins mauvaise, qui n’a rien de commun avec celle de Wagner, mais
dont le principal mérite est d’être faite par les prôneurs du wagnérisme à
outrance. […] de là, naissent les malentendus et de là aussi
viennent certaines erreurs qui découlent des doctrines dissolvantes répandues à
profusion […] En effet, la plupart
des adeptes de la nouvelle école — maladroits adeptes — font, inconsciemment
sans doute, à leur cause et à la cause de la musique en général, le plus grand
tort ; voici comment : Une de leurs manies favorites est qu’il ne faut
jamais faire ce qui est conforme aux règles ! Les braver à tout propos et
sans raison est pour eux une grande joie, et on peut dire que c’est souvent là
leur plus grande originalité. […] Il
n’est, en effet, pas rare de rencontrer aujourd’hui des jeunes gens qui
affirment d’un air dégagé qu’il n’est pas nécessaire pour être compositeur de
faire de sérieuses études d’harmonie, de contrepoint et de fugue. — Quelques
notions suffisent et l’instinct fait le reste ! Et toujours ces beaux
raisonnements à propos et sous l’égide de Wagner ! Mais ils n’ont donc pas
lu ses ouvrages, et ils ignorent donc que le maître a une science incomparable
acquise par de longues et fortes études, qu’il possède à fond les secrets de
son art, et que s’il enfreint si bien les règles, c’est qu’il les connaît à
merveille. »… — On joint : La lettre d’accompagnement de
cet article, Rosnay, 7 septembre 1885, à
son éditeur Henri Heugel ; 2 p. in-8°. Il lui propose de réimprimer
ces propos dans le Ménestrel. « Il
est assez curieux à rapprocher de ceux de Saint-Saëns
à cause de la similitude fréquente des idées, et aussi parce qu’à cette époque,
je suis un des premiers qui ait osé dire certaines vérités. » A la
suite, il donne le tarif de ses leçons particulières : « j’ai réfléchi que 100 fr est un prix
bien élevé s’il ne s’agit que de simples leçons. S’il s’agit de corriger des
compositions, de les remanier et de les mettre au point, c’est différent, et le
prix de 100 fr n’est pas trop (40 fr chez moi). Si au contraire ce sont de
simples leçons d’harmonie ou de contrepoint etc… dites 60 fr (25 fr chez
moi). »… 450 €
16.- Renée DUNAN [1892-1936],
romancière, auteur de romans érotiques sous divers pseudonymes, elle fréquenta
les dadaïstes. LAS, Paris, 14
décembre 1922 ; 2 pp. in-4°. Elle accepte d’intervenir en faveur de Jean
Magliano, mais elle prie son correspondant de ne pas exagérer la valeur de ses
relations au Progrès Civique :
« je me demande où l’on a pu chercher ce qui me fut dit ces jours :
« Je tiens de bonne source que vous allez être critique dramatique,
critique littéraire, rédactrice-major, etc. » Vraiment, je ne me suis vue
en posture d’accepter aucun de ces postes honorables. » Elle se défend
de rechercher tout poste honorifique : « Je veux travailler chez moi, à des articles
que je porterais ou enverrais, mais ne sauraient m’attacher au banc de la
galère. Nous nous regardons donc en chiens de faïence, avec les dirigeants
du lieu, et il ne faut pas surestimer mon crédit, lequel n’a encore point été
mis à l’épreuve. » Elle évoque ensuite le prix Goncourt qui a été
remis à Henri Béraud pour son Vitriol de
Lune : « L’Académie Goncourt a
acheté le silence sur le Journal d’Edmond. 10 voix à Deffoux, grand électeur,
qui en a disposé à raison de 5 (dont une bifide) pour Béraud, ce qui n’est pas
injuste, et 4 pour Romains, ce qui est plutôt jovial. […] Il y a longtemps que je savais ça par Geffroy qui me l’a dit… pourvu que je
lui promette de revenir le voir aux Gobelins. »… RARE. 150 €
17.- Amaury DUVAL
[1760-1838], diplomate, historien, archéologue et écrivain, membre de
l’Académie des Inscriptions, père du peintre Amaury-Duval (1808-1885). Deux lettres au docteur Des Essartz,
doyen de la Faculté de Médecine de Paris. 1) LA signée comme chef du Bureau des Beaux-Arts au Ministère de
l’Intérieur, s.d. ; 1 p. in-8°, en-tête Le Ministre de L’Intérieur, vignette. Le ministre l’a chargé de se
concerter avec Des Essartz « sur les
mesures à prendre pour la prompte publication de [son] rapport sur les mémoires qui ont été adressés à l’institut en réponse à
la question relative aux funérailles. » Il lui suggère donc de lui
apporter son manuscrit un matin à son bureau afin qu’il puisse « juger des frais qu’en occasionnera
l’impression. »… - 2) LAS, Paris,
23 germinal an IX [13 avril 1801] ; 1 p. ½ in-4°, en-tête Ministère de l’Intérieur, vignette. Il
le remercie de la mention qu’il a faite de son ouvrage dans son « excellent rapport sur la question
relative aux cérémonies funéraires. » Il attendait, pour lui
répondre, que le ministre eut pris une décision sur la proposition de Des
Essartz de l’envoyer gratuitement aux préfets. « Je ne vous cacherai pas que je lui propose de payer à votre
libraire, les exemplaires qu’il a envoyés au Bureau des Beaux-Arts. Il ne
serait pas juste que le gouvernement qui aurait dû faire les frais de
l’impression de l’ouvrage profitât encore de l’excessif désintéressement de son
auteur. »… 80 €
18.- Gabriel FAURÉ [1845-1924],
pianiste, organiste et compositeur. LAS,
s.d., à une dame ; 1 p. in-8°. Les concours l’ont
privé du grand plaisir de Bagatelle. « Pardonnez-moi,
je vous prie, et pardonnez-moi de n’avoir pu encore aller vous remercier.
J’aimerais vous donner quelques détails sur la façon dont mes nouvelles fonctions ont été savamment allégées, de façon à ce que
je puisse m’occuper de musique, ce qui est important ! »… 150 €
19.- [Gustave FLAUBERT] Achille FLAUBERT [1813-1882], médecin,
frère aîné de Gustave Flaubert. LAS,
17 janvier 1860, au docteur Jules Cloquet, chirurgien, médecin
et ami de Gustave Flaubert, élève de son père Achille-Cléophas Flaubert et maître
de son frère Achille ; 3 pp. in-8°. Très
intéressante lettre sur la maladie de Flaubert. « Un mot de ma mère
qui nous parvient ce matin nous apprend que Gustave a été repris de ses accidents d'autrefois et qu'en tombant
il s'est blessé à la face. Tout cela me paraît assez singulier et quelle est la
vérité ? Est-il bien réel que les
accidents épileptiformes soient revenus ? Ce serait désolant après une
guérison apparente aussi prolongée. Gustave,
d'ailleurs, fait tout ce qu'il peut, par sa manière de vivre, pour les faire
reparaître : il fait de la nuit le jour, des excès de travail, une
surexcitation continuelle, etc. Quelque soit enfin la nature de l'accident
qu'il a éprouvé, dites-le moi et quand il sera guéri ou remis, sermonnez le
d'importance à ce sujet ; il vous aime beaucoup et a comme nous tous grande
confiance en vous. Peut-être vous écoutera-t-il avec profit pour lui ?... »
— C’est la première fois qu’un membre de la famille de Flaubert évoque les
« accidents épileptiformes » dont souffrait l’écrivain. Cette lettre
n’est pas inédite. Elle a été publiée par Gaston Bosquet dans les « Amis
de Flaubert » n° 7, 1955 p. 52. Dans une
lettre aux frères Goncourt du 24 janvier 1860, Flaubert fait allusion à cette
chute, sans parler de la crise d’épilepsie qui l’a provoquée : « Il y a
huit jours, je me suis laissé tomber stupidement sur le pavé et j'ai une
balafre horrible au nez et au sourcil qui m'empêche de montrer ma figure aux
populations. » 480
€
20.- [FOU LITTÉRAIRE] PIERQUIN DE GEMBLOUX (Claude-Charles), Idiomologie des animaux ou Recherches historiques, anatomiques,
physiologiques, philologiques et glossologiques sur le langage des bêtes. Paris,
A la Tour de Babel, Quai Voltaire, 13, 1844. In-8° br. 156 pp. E.O. Couv. défr., dos fendu, mouillures. Curieux ouvrage de ce
polygraphe original, érudit et aventurier, amant de la cantatrice Caroline Branchu,
signalé par André Blavier dans son dictionnaire des fous littéraires et repéré
par Noël Arnaud qui lui consacra une notice dans la revue Bizarre. Nous retiendrons de cet opuscule étonnant, entre autres
loufoqueries, la transcription du chant d’un rossignol par le savant
ornithologiste allemand Bechstein, les 25 mots de l’Idiome-Corbeau et surtout
le Glossaire-Ouistiti. RARE. 150 €
21.- Antoine-Quentin
FOUQUIER-TINVILLE [1746-1795], accusateur public du Tribunal
révolutionnaire. LAS, an II, à Pierre Gilbert de Voisins, procureur
général du département de Paris ; 1 p. in-4° (petit manque en haut et en
bas du document suite au bris du cachet). Il suppose qu’il a été informé « qu’il y a environ 15 jours neuf
prisonniers s’étoient évadés de la Conciergerie et que cette évasion avoit eu
lieu à la faveur d’un trou qui avoit été pratiqué au plafond du cabinet n° 7
donnant dans la galerie ditte des prisonniers ; […] il
est à craindre que pareille évasion ne se réalise par le même cabinet et autres
établis autour de la Conciergerie : pour la sûreté de cette prison il
paroitroit nécessaire de faire démolir au plus tôt tous ces cabinets qui ne
servent et ne peuvent servir qu’à loger les rats… » — Joint : Trois portraits gravés de
Fouquier-Tinville par Levacher (an VII, reproduit ci-dessus), L. Portman et E.
Müller. 900 €
ANATOLE FRANCE, HONORÉ DE
BALZAC & GEORGE SAND
22.- Anatole FRANCE [1844-1924],
écrivain. Trois brouillons de lettres adressées, fin septembre 1874, à George Sand, à Mme Hanska et au frère de Tocqueville, Hippolyte. Ces
lettres furent rédigées par France au nom de son employeur Alphonse Lemerre,
pour obtenir l’autorisation de publier des textes de Sand, Balzac et Alexis de
Tocqueville [tous édités chez Michel Lévy] dans l’Anthologie des prosateurs français depuis le XIIe siècle jusqu’à nos
jours en préparation. Ces demandes ont été rédigées sur le même modèle,
dont la lettre à Tocqueville offre la forme la plus achevée. Seuls deux
paragraphes présentent un caractère plus personnel. On peut donc aisément
reconstituer le texte des lettres qui ont été adressées à George Sand et à Mme
Hanska en dépit des blancs importants que présentent leurs brouillons. 1) Anatole
France à George Sand : « Madame,
Je termine [en ce moment la publication d’une anthologie des prosateurs
français, ouvrage destiné à l’enseignement classique et qui sert de complément
à mon anthologie des poëtes déjà adoptée par le conseil de l’Instruction
publique.] Je croirais le livre incomplet
si vous n’y étiez pas représentée et même par plus d’un extrait. J’ai demandé [dans
cette intention, à M. Michel Lévy éditeur, l’autorisation de publier [des pages
tirées de …] Je n’ai pas reçu de réponse définitive et
mon livre est attendu pour la rentrée des classes]. C’est à vous, Madame, que je m’adresse pour obtenir l’autorisation dont
j’ai besoin. Je suis certain d’avance que vous ne priverez pas la jeunesse des
écoles de deux ou trois pages tirées de vos livres et qui feront un des
principaux ornements de mon anthologie. » — George Sand a donné
son accord dans une lettre en date du 5 octobre 1874 et l’anthologie de Lemerre
a pu s’enrichir d’une des Lettres d’un
voyageur et d’un morceau des Sept
cordes de la lyre. — Joint : Une lettre de Georges Lubin au
marchand d’autographes Eugène Rossignol (19 mai 1975 ; 1 p. in-8°), le
remerciant pour la communication de ce brouillon et lui en précisant la
date : « La lettre d’Anatole
France est sans doute de la fin de septembre 1874, car la réponse, que j’ai vue
chez Loliée il y a quelques années, est du 5 octobre. » — 2) Anatole
France à Mme Hanska : Texte identique avec ces deux variantes : « Je souhaiterais vivement que
l’illustre écrivain dont vous portez le nom fût représenté dans ce petit
ouvrage d’enseignement. » « C’est à vous, Madame, que je m’adresse,
pour obtenir l’autorisation attendue. Je sais Madame que vous ne refuserez pas
la page d’Honoré de Balzac que je vous demande dans l’intérêt des études
classiques. » —3) Anatole France à Hippolyte de
Tocqueville : Texte identique avec ces variantes : « Je voudrais, Monsieur, que votre
illustre frère figurât dans ce recueil et j’ai demandé, dans cette intention, à
M. Michel Lévy éditeur, l’autorisation de publier une page tirée de L’Ancien
régime. » « C’est à vous Monsieur que je m’adresse pour que la
jeunesse des écoles ne soit pas privée d’une page choisie dans les œuvres d’un
écrivain et d’un penseur tel qu’Alexis de Tocqueville. C’est là une demande que
vous ne pourrez qu’agréer. Je n’attends pas moins de votre esprit libéralement
éclairé et suis M., etc » 230 €
23.- Denis Antoine Luc, comte
FRAYSSINOUS [1765-1841], évêque d’Hermopolis, ministre des Affaires
ecclésiastiques et de l’Instruction publique, orateur et écrivain [Acad. fr.
1822]. LS, Paris, 1er
avril 1823, au comte Gaspard de Chabrol,
préfet du département de la Seine ; 1 p. in-folio, en-tête L’Evêque d’Hermopolis, Premier Aumônier du
Roi, Grand Maître de l’Université de France (légt défr.). A propos des
travaux à effectuer au Collège Saint-Louis pour y établir un pensionnat avant
la rentrée des classes du 1er octobre 1823. « Je dois appeler votre attention sur le mobilier des dortoirs
dont la dépense paraît devoir être entièrement supportée par la ville de Paris.
[…] Il paraît impossible que le
conseil municipal ne considère pas comme frais de 1er établissement
la fourniture des lits nécessaires aux élèves internes qui seront admis dans le
nouveau pensionnat de Saint-Louis ; dès lors rien ne semble devoir
s’opposer à ce que la Ville de Paris soit chargée de cette dépense. »… 40 €
24.- André GIDE [1869-1951],
écrivain. LAS, Nice, 29 février
1940, à Michel Lévêque ; 3 pp.
in-8°. Il y a longtemps qu’il n’a pas écrit à son jeune ami, mais il a bien
reçu sa lettre du 20 février. Il a également reçu des bonnes nouvelles de
Robert Lévêque, frère de Michel. Pour le moment, Gide s’occupe d’une « lugubre histoire » :
« Tu as dû lire, il y a deux ans [en fait en 1936] un petit bouquin de Yvon (c’est un
pseudonyme)[celui
de Robert Guiheneuf, 1899-1986] sur Ce
qu’est devenue la Révolution Russe. C’est
ce qu’on a écrit de mieux sur la Soviétie. Admirablement documenté, car Yvon a
passé là bas douze ans et traversé tous les stades depuis celui de simple
ouvrier, jusqu’à directeur technique d’une usine. Il s’est échappé de cet enfer
à grand peine, avec la femme qu’il avait épousée là
bas et un mioche qui a maintenant près de treize ans. Mais les épreuves ont
été trop affreuses et, lors de sa dernière permission, Yvon est arrivé à Paris
juste à temps pour voir interner sa femme dans un asyle d’aliénés. Il reste
avec son gosse, dont sa femme, dans un dernier moment de lucidité, m’a supplié
de m’occuper. » Gide cherche à présent une famille à qui confier cet
enfant qui doit poursuivre ses études. Visiblement cette histoire l’a
bouleversé : « Je te raconte tout cela… Mais cette affaire
m’emplit le cœur. » Il voit souvent Gabilanez, qui a conquis les
Bussy (Simon et Dorothy), chez qui il habite. « Il se sent en confiance près d’eux, de nous, et nous développe
longuement des théories époustouflantes. Il est, avec cela, très naturel,
prodigieusement vivant… charmant. » Gide compte rentrer à Paris dans
une quinzaine de jours et revoir Michel Lévêque à l’occasion de sa prochaine
permission. « Quand sera-ce ?
Il pourra se passer des choses d’ici là. Sitôt de retour en ville, j’aurai
plaisir à revoir tes parents — en attendant de pouvoir t’embrasser bien
fort. » 360 €
25.- André GILL [1840-1885],
dessinateur. Dessin original en couleurs
aquarellé sur calque, signé et daté (8 octobre 1870), format 16,5 x 22,5 cm
sur feuille 22 x 31 cm (petite déchirure dans la marge dextre). Portrait de Gustave Flourens en garde national.
Flourens (1838-1871), professeur au Collège de France, sera élu chef de
bataillon de la Garde Nationale de Belleville. Membre du Conseil de la Commune
(19e arrondissement), il sera tué à Rueil le 3 avril 1871 par un
capitaine de gendarmerie lors d’une offensive contre les Versaillais. — Joint, du même : une
lithographie signée dans la pierre intitulée Montmartre 18 mars, format 21 x 27,5 cm. La lithographie montre
deux cadavres au pied d’un mur. Il s’agit des corps des généraux Clément et
Lecomte, exécutés rue des Rosiers le jour de la proclamation de la Commune de
Paris. 300 €
QUAND L’AUTRE
GUILLOTIN VENDAIT LES
GLACES DE CHARLES
X
26.- Guillaume-Jacques-Adrien GUILLOTIN
[?- ?], membre du bureau du Domaine National. LS, Paris, 12 thermidor an V [30 juillet 1797], au citoyen Maxeberg, entrepreneur
général d’artillerie ; 1 p. ½ in-4°, en-tête Bureau du Domaine National du Département de la Seine, vignette au
faisceau et au bonnet phrygien (légt défr.). A propos de la vente de glaces
ayant appartenu à Charles Philippe, autrement dit le comte d’Artois, futur
Charles X. « Le Ministre des
Finances nous observe, Citoyen, par sa lettre du 26 Prairial, que par celle
qu’il vous a adressée le 13 Thermidor de l’an 4e il vous a prévenu
qu’il avoit fixé à la somme de Cinq Mille Deux Cents francs le prix des
Glaces d’une Maison Size rue du fg Honoré n° 108, provenant de l’Emigré Charles Philippe, dont vous
vous etes rendu adjudicataire et qu’il vous invitoit en même tems à lui faire
connoitre si vous consentiez à faire l’acquisition de ces Glaces à ce
prix. »… — Document également signé par François Duchatel, autre
membre du Bureau du Domaine National. 120 €
27.- André-Ferdinand HÉROLD [1865-1940],
poète et auteur dramatique symboliste. Manuscrit
autographe signé : Du
« Vitrail des Saintes » (Ursula – Beatrix – Odilis – Suzanna – Bertilla – Agatha), six
poèmes publiés dans la livraison de mai 1892 du Mercure de France ; 3 pp. ¼ gd in-4° (20,5 x 31 cm) ;
tampon du Mercure en tête du premier
feuillet, indications manuscrites de la main d’Alfred
Vallettte (importante fente au pli central des 2 premiers feuillets). Nous
donnons ci-après le texte complet de Bertilla : « Aux marges
neuves d’un bel évangéliaire,
L’Abbesse peint des colombes et des
griffons ;
Elle peint des rameaux d’olivier et de
lierre
Ou des Anges volant parmi des ciels
profonds.
Là, Jésus dort en son berceau de paille
fraîche ;
Et voici les Trois Rois Mages et les Bergers
Que l’Etoile guida vers la divine crèche
Avec les vases d’or et les fruits des
vergers.
La sage Abbesse
peint ses douces rêveries,
Le Précurseur, grave et maigre, et vêtu de
peau,
Et le Seigneur qui, dans les mystiques
prairies,
Veille sur les brebis de son chaste
troupeau.
Et la tête du Christ saignant au mur se
baisse
Pour mieux voir et sourit à la savante
Abbesse. » 200 €
28.- [Adèle HUGO], Victor Hugo raconté par un témoin de sa
vie. Tome I seul. Paris, Librairie Internationale, A. Lacroix,
Verboeckhoven & Cie, éditeurs, 1863. Demi-maroquin in-8°, dos à
5 nerfs orné de cartouches et de fleurons dorés (légt frotté), 421 pp. ;
sans la couverture, coins découverts. E.O. française parue sans nom d’auteur
après l’édition belge, dans laquelle abondent les fautes typographiques. Un des rares expl. non justifiés sur
Hollande. Celui-ci est particulièrement précieux puisqu’enrichi d’un envoi a. s. d’Adèle Hugo à Victor
Hugo : « A l’inspirateur de
ce livre. Sa femme et sa meilleure amie. Adèle Victor Hugo. » 550 €
29.- [Max JACOB] André
SALMON, Max Jacob poète, peintre,
mystique et homme de qualité. Paris, René Girard, 1927. In-4° br. 58 pp.
E.O. tirée à 525 expl. Un des 25 expl. hors commerce sur vélin Lafuma, non
numérotés. — On joint : 1)
Max Jacob : LAS, Saint-Benoît, 20 janvier, à un
ami ; 1 p. in-8°. Vœux : « Les
souhaits les plus tardifs ne sont pas les moins sincères, ni les sentiments les
plus silencieux, les moins vifs. Croyez-moi très dévoué à vous en N.S. et en
notre père St-Benoît. » - 2) André Salmon : Carte
postale a. s.,
« la Hune », Sanary-sur-Mer, 15 février 1952, à André Parinaud ; 1 p. in-12 (pli). « Je ne puis […] rien de
plus que vous adresser les textes demandés. Vous les aurez en temps utile, soit
lundi. »… 250 €
30.- Tristan KLINGSOR [1874-1966],
poète, musicien, peintre et critique d’art. Poème autographe signé, Chanson
de l’Oseille, s.d. ; 1 p. in-8° contrecollée
sur carte souple (12 vers).
« Voici déjà l’oseille écarlate
Ou quasi ;
Ma tête est pleine de poésie
Et ma bourse est plate.
Rire, chanson, ni peine
Ne font grasse panse ;
Jambon de Mayence
Vaut mieux que long poème. »… 60 €
31.- Henri Cazalis dit Jean LAHOR [1840-1909], médecin et
poète symboliste. PAS, 6 mai
1902 ; 2/3 p. in-8°. « J’autorise
M. Sachs [Léo Sachs] à mettre en
musique et à publier l’Aubade de mon volume l’Illusion. J. Lahor.
6 mai 1902. » 25 €
32.- Louis-Mathieu LANGLÈS [1763-1824],
orientaliste, fondateur et premier directeur de l’Ecole spéciale des Langues
orientales. Manuscrit autographe, s.d. ; 2 pp. ½ in-4°. Règlement en 12 articles
concernant les deux secrétaires et le copiste arabe de l’Ecole Spéciale de
Langues Orientales Vivantes. Extraits : « Article premier. Les deux secrétaires et le Copiste arabe de
l’Ecole Spéciale de Langues orientales vivantes sont à la disposition de
l’administrateur et des professeurs tous les jours depuis dix heures jusqu’à
deux excepté les dimanches et fêtes. – 2. Ils secondent les professeurs dans
les travaux littéraires soit en transcrivant des textes orientaux, soit en les
traduisant, en corrigeant des épreuves, etc. – 3. Le professeur qui a besoin
d’un des deux secrétaires ou du copiste arabe, adresse la demande à
l’administrateur, en indiquant à peu près la durée du travail dont il va les
charger. »… 75 €
33.- Charles-Martial LAVIGERIE
[1825-1892], prélat, archevêque puis cardinal d’Alger. LAS, Paris, 22 mars 1859, à
Charles Jourdain ; 2 pp. in-8°, en-tête Œuvre des Ecoles d’Orient. Le conseil d’administration de l’Œuvre
des Ecoles d’Orient désirerait savoir si Jourdain accepterait le titre et les
fonctions de l’un de ses membres. « Il
me prie de vous dire, Monsieur, combien il s’estimerait heureux de profiter des
lumières de votre expérience et de voir votre nom, si honorable à tous les
titres, se joindre à ceux des membres illustres qu’il compte déjà dans son
sein. »… 50 €
34.- Antoine LOUIS
[1723-1792], chirurgien, collaborateur du docteur Guillotin, c’est lui qui
imagina de sectionner la tête des suppliciés au moyen d’une lame
biseautée ; avant d’être appelée guillotine, la machine à raccourcir fut
d’abord baptisée « louisette ». Consultation
médicale autographe signée, Paris, 28 octobre 1776 ; 3 pp. ½ in-4°
(infimes fentes et taches d’encre au bas de la dernière page). Extraits : « Il y a un engorgement qu’on peut
légitimement attribuer à une humeur lymphatique. Il n’y a pas d’autre
indication à suivre que de tacher de fondre cette humeur (…) Le
régime est indispensable au moins pour empêcher les progrès de la tumeur. Il
faut soigneusement éviter le lait, le
fromage, la pâtisserie, les viandes salées et épicées, toute espèce de
ragouts ; on peut se permettre en ce genre la fricassée de poulet, la
blanquette de veau. En général il faut
peu manger de viandes ; (…)
Les bains domestiques seront très utiles,
à un degré de chaleur tempérée ; les bains froids seroient nuisibles.
Parmi les remèdes, les bouillons de poulet, ou de veau avec le cerfeuil, la
chicorée feront du bien : en mettant dans la première tasse quatre
onces de jus de puré de chicorée sauvage.
La continuation de ce jus d’herbe ne peut manquer d’être salutaire.
Comme la maladie sera longue, il faudra varier les remèdes, auxquels la nature
finiroit par s’habituer par une trop longue continuation. (…) Les
bouillons médicamenteux dans lesquels on écrasera une vingtaine de cloportes
vivants, seront très efficaces. Dans leur discontinuation, on usera de pilules
savoneuses. Tous ces fondans doux et néanmoins très efficaces (…) exigent de temps à autre l’usage des purgations, avec la manne et
l’arcanum duplicatum : mais il faut saisir le temps opportun (…) quelques doux que soient les purgatifs, ils
agissent toujours par irritation. On pourra encore avoir recours aux injections
de décoction de guimauve avec un peu de fleur de sureau, pour être portées dans
le vagin avec une seringue appropriée à cet usage, afin de calmer immédiatement
l’endroit souffrant. Il faut tacher d’avoir habituellement la liberté du
ventre, car la constipation doit beaucoup éviter cette partie. (…) Si ces
secours variés et purgatifs avec le moins d’interruption possible, dès le mois
de juin n’avoient pas apporté un soulagement assés marqué pour se promettre une guérison radicale, il
faudroit aller prendre les eaux de Banèges et en cas de trop grand éloignement,
et l’impossibilité de faire ce grand voyage, il faudroit venir à
Plombières. »… TRÈS RARE. 500 €
35.- André MALRAUX [1901-1976],
écrivain et homme politique. Lettre
dactylographiée signée, Paris, 6 juillet 1936, à Jean Carteret ; 1 p. in-4°, en-tête Association Internationale des Ecrivains pour la Défense de la Culture.
Il répond à une lettre de Carteret désireux d’obtenir des facilités pour un
voyage. « Comme je vous l’ai dit, la
combinaison qui permettait autrefois à André
Gide d’assurer quelques voyages n’existe plus. Il ne peut donc être
désormais question que de l’Etat. » Il transmet sa lettre au ministre
des Loisirs, seul compétent en la matière, mais il le prévient : « Inutile de vous dire que je ne crois
pas à un arrangement pour le 10 juillet car ces choses, même quand elles
réussissent, ne réussissent jamais vite. »… — Joint : La
réponse de Jean CARTERET (1906-1980), poète, astrologue et philosophe. LAS, Paris, 10 juillet 1936 ;
demi-page in-4°. Il téléphonera à Bécart, chef du secrétariat particulier du
ministre. « Quelle que soit la
réponse, je quitterai Paris au plus tôt, pour opérer au contact de nouveaux
milieux ces recherches utiles à l’œuvre que je projette. Sans votre action
directe, je redoute devoir abandonner pour cette année mon départ pour la Chine,
mais je souhaite ardemment l’heureuse issue de votre intervention. »…
150 €
36.- MARIE-CAROLINE CHARLOTTE d’AUTRICHE
[1752-1814], reine de Naples et des Deux-Siciles, sœur aînée de
Marie-Antoinette. LA signée
« Charlotte », Palerme, 31 mars 1799, en français, probablement à
un diplomate ; 4 pp. in-4°. Très intéressante lettre politique dans
laquelle elle évoque la situation troublée de son pays et ses relations avec la
Turquie et les autres pays d’Europe. Cette lettre confirme ce que l’on savait
déjà, que c’était elle et non son mari Ferdinand IV qui tenait les rênes du pouvoir.
Elle insiste sur l’importance de cultiver l’amitié de la Turquie, « que nous avons toujours regardé et
regardons encore come une de nos meilleures alliées. Les secours de tous les
genres nous les attendons de leur constante amitié come eux ils peuvent compter
sur notre éternelle reconnoissance. Le
point le plus essentiel pour le moment ce seroit la Paix avec les Régences de
Barbarie [ ;] elles faciliteroit notre commerce et obligeroit infiniment la
nation Sicilienne, en meme temps
que cella feroit jalouser la napolitaine de jouir du meme bonheur. » Elle
déplore de manquer de nouvelle des siens et d’autres nations amies : « Nous manquons de nouvelles de Vienne
depuis le mois de novembre et de tout le Nord. Mais nous avons appris par
Livourne la guerre de l’Empereur déclaré et les hostilités meme comencée ;
de fait on craint la Toscane envahi pour se venger, les francois occupée par la
guerre de l’Empereur, l’aproche de plusieurs endroits des troupes russes, de
l’insurrection de la Belgique, du peu de contentement des Italiens, de tant de
points a deffendre n’ont point pu envoyer ni renforts ni secours a Naples ce
qui fait que les Provinces apres le premier moment ou les mauvais sujets
partans et la peur a fait planter tous les arbres et s’erriger a la suite de
l’ingrate capitale. Tout le royaume est
république. […] L’Escadre
angloise est allé pour faire le blocus de Naples. Cette ville est entierement
gaté. Le Peuple y est fidelle mais avilis oprimé. La noblesse et les plus [mot
illis.] sont les plus indignes, quelques
jeunes gens Etudians […] et les
mauvais moines du clergé ce sont les classes corrompus et tout ce qui est
militaire de terre come de mere mais ce sont des etres si vils avilis
méprisables et poltrons que leur défection n’acquiert que des infames sujets à
la République et par conséquent nullement a regretter. » Elle souhaite
la prompte venue des Russes et compte sur le soutien des troupes Turques.
Marie-Caroline indique à son correspondant qu’elle est toujours en Sicile et ne
cache pas sa grande tristesse : « mon ame est infiniment afectée des malheurs
que j’ai éprouvé et éprouve encore et cela afecte cruellement ma santé depuis
le mois de novembre. » Elle redit son inquiétude d’être sans
nouvelles de Vienne ni de la Russie :
« nous ne savons que par votre
lettre écrite qu’un traité ait eue lieu entre la Russie et nous. Cette
stagnation de nouvelles und notre position infiniment scabreuse surtout dans
ces momens mon cœur ame est agité de mille inquiétude pour notre sort futur,
pour le sort de mes enfans, de ma pauvre fille en Toscane [Louise-Marie,
épouse du grand-duc de Toscane Ferdinand III]. L’ingratitude atroce des habitans
de Naples blesse et revolte mon cœur et ame pour celles qu’ils usent vers le
meilleur des Rois qui ne les a que trop aimés, enfin je suis malheureuse. »… 500 €
37.- [MARINE - MARSEILLE -1824] Antoine ROY [1764-1847], comte et pair de France, ministre des
Finances de Charles X. Pièce signée en
partie imprimée, mai 1824 ; 1 p. in-folio (35 x 50 cm) sur parchemin
(petite fente en tête). Acte de
francisation du Saint-Laurent,
appartenant à Marie-Martine Avenante, armateur à Marseille. « Ce bateau a un mât, point de
pont ; […] sa longueur de
l’éperon à l’étambot est de trente quatre pieds ; […] sa plus grande largeur est de onze pieds
onze pouces ; [que] sa hauteur
est de quatre pieds cinq pces ; […] il mesure 19 tonneaux ¾ ayant été jaugé suivant la manière prescrite
par la Loi du 12 Nivôse de l’an 2. […] le Propriétaire dudit bateau a rempli les formalités prescrites par la
loi du 27 Vendémiaire an 2, pour constater qu’il est propriété française ;
que les déclarations, sermens, soumissions et cautionnemens prescrits par
ladite Loi, ont été faits le 29 mai 1824 et enregistrés N° 1887 sur le registre
du Bureau de Marseille où réside ledit Propriétaire. Pour quoi il a droit de naviguer sous le pavillon de France. Enjoignons
en conséquence aux Commandans des Bâtimens du Royaume, à tous Fonctionnaires
publics, de le reconnaître pour Français, et de le faire jouir de tous les
privilèges des Vaisseaux du Royaume… » 80 €
38.- Jacques MARITAIN [1882-1973],
philosophe chrétien. Carte a. s., Meudon,
jeudi, à Maurice Sachs ; 2 pp.
in-12. Il lui donne des nouvelles de sa santé et le remercie pour l’envoi de
ses deux cartes. « Nous pensons
beaucoup à vous, vous le savez. Je voudrais tant que vous n’ayez pas trop à
souffrir à Dinard ! Au moment où
vous êtes, avant de se donner à Dieu pour toujours, il n’est pas rare que le
diable emploie ses prestiges à assaillir l’âme avec violence. Nous avons connu
cela, avant de recevoir le baptême. J’espère que ce tourment vous sera
épargné. Mais si cela arrivait, sachez que la tactique avec cet ennemi des
hommes est de se faire tout petit, et de le laisser crier avec indifférence, en
se jetant en grande nudité d’esprit entre les mains de Dieu. »… 60 €
39.- André MASSÉNA
[1758-1817], général de la Révolution, maréchal d’Empire, duc de Rivoli, prince
d’Essling. LAS, Quartier-Général de
Loano, 16 Prairial an III [4 juin 1795], au
général Jean-Baptiste Cervoni ; 2 pp. ½ in-4°, en-tête André Masséna Général divisionnaire
Commandant la droite de l’Armée d’Italie. Il ne cache pas son agacement en
constatant que certains de ses ordres n’ont pas été exécutés. « Les 3 Compies de Grenadiers
de la 56e et les trois de la 99e doivent former le 6e
Baton de Grenadiers, j’apprends qu’elles sont divisées, je ne sais
par quel ordre cela n’a pas été fait, qu’à la réception de la présente les
trois Compies qui sont à St-Jacques se rendent au camp de
Feliguio, j’écris au Général Laharpe pour que les trois de la 99e se
rendent également au même camp. Rendez-moi compte, je vous prie, si les troupes
qui devoient camper à St-Pantaléon, à la Redoute de Carbua et à
celle de Feliguio y sont, il est instant
que mes ordres ne souffrent à l’avenir aucun retard. »… Masséna annonce à Cervoni qu’il va
ordonner qu’on lui procure des tentes pour le bataillon de Grenadiers : « vous pouvez en attendant qu’elles
arrivent le cantonner à Orco. »… — Joint : deux portraits
gravés de Masséna. 280 €
40.- Jean-Frédéric Phélypeaux,
comte de MAUREPAS [1701-1781], homme d’Etat, ministre de Louis XV et de
Louis XVI. LS, Fontainebleau, 4
juillet 1731, au maréchal de
Villars ; 1 p. in-folio (légt défr.). Maurepas est alors ministre de
la Marine de Louis XV, poste qu’il occupa de 1723 jusqu’à sa disgrâce, survenue
en 1749. Sa lettre au maréchal de Villars est relative à une contestation
élevée entre le marquis de Rouvroy et Thomas de Chateauneuf. « J’ay l’honneur, Monsieur, de vous
envoyer la copie que M. Mithon m’a adressée de l’arrest citté dans les Ecrits
du chapitre de Toulon que vous m’avez marqué estre nécessaire pour faire
décider la contestation qu’il y a entre M. le mqis de Rouvroy et le
sr Thomas de Chateauneuf. J’y joins aussy la lettre que M. Mithon
m’escrit en m’envoyant cet arrest. »… 50 €
41.- Darius MILHAUD, La Sagesse. Livret
de Paul Claudel. Sans éditeur, ni lieu ni date [1935]. Fac-similé du manuscrit
original. In-4° br. 73 pp. Un des 15 expl. sur vergé de Hollande, seul grand
papier [n° 8 provenant des archives de l’éditeur Heugel]. Couv. défr., premier plat détaché, dos abîmé, petit travail de
vers affectant le second plat et les 3 derniers feuillets. — On joint : 1) Darius MILHAUD, Carte postale a. s.,
[Paris, 10 janvier 1952], à un ami ;
1 p. in-12 (trous de classeur ). A propos d’une exposition consacrée au Groupe
des Six par le Centre de Documentation de Musique internationale en décembre
1951 : « Ainsi que je l’ai
promis à M. Ph. Heugel, je vous autoriserai à exposer à l’étranger une partie
importante des documents que je vous ai prêtés pour l’Expo des 6. Mais je désire reprendre néanmoins les manuscrits
littéraires que je vous ai confiés. »… – 2) Une LAS de la femme de Milhaud à François
Heugel, 29 septembre 1971 ; 1 p. in-8°. « La Rue des Clochettes est à Champel au bout de l’avenue Dumas.
Nous serions enchantés de vous y voir bientôt. Milhaud va un peu mieux. »… 200 €
42.- Oscar Venceslas de Lubicz MILOSZ
[1877-1939], poète, romancier, dramaturge et ambassadeur de Lithuanie en
France. LAS, Paris, s.d., au docteur
Allendy ; 3 pp. in-8°, en-tête Légation
de Lithuanie (petit trou au pli central sans perte de texte). En le remerciant du souvenir
sympathique qu’il a gardé de son entretien chez Albert Gleizes et son épouse, « ainsi
que des clartés nouvelles que je dois au remarquable exposé de Monsieur le
Docteur Jaworski ». Il le prie de vouloir bien associer son nom « à ceux des amis du groupe
« Studio ». » Par ailleurs, il serait très heureux de se
trouver parmi les auditeurs de la conférence que le docteur Allendy doit faire
le vendredi 2 février « sur la Vie, —
admirable et terrible sujet ! »… 220 €
43.- Claude
MONET [Paris, 1840 – Giverny, 1926], peintre impressionniste. Enveloppe autographe libellée à
l’adresse de son ami Gustave Geffroy,
romancier, auteur dramatique et critique d’art [Paris, 1855-1926] ; format :
9,5 x 12 cm. Cachet postal : 4 juin 1889. Gustave Geffroy fut très proche
de Claude Monet. Lors de la dispersion des archives du peintre, ce ne sont pas
moins de 250 lettres à lui adressées par Geffroy entre 1886 et 1925 qui furent
proposées aux amateurs. Il est légitime de supposer que dans la lettre que
contenait l’enveloppe, Monet répondait à une lettre que Geffroy lui avait
envoyée le 28 mai et dont le catalogue de la vente cite l’extrait suivant :
« Dites-moi donc, définitivement, à
quelle date je dois livrer la notice sur Rodin »…
Il y était donc question de l’exposition conjointe que Rodin et Monet
devaient faire à la Galerie de Georges Petit, en juin 1889. Les notices
devaient être rédigées par Octave Mirbeau et Gustave Geffroy. Ces derniers
étant très liés avec Monet, ils avaient dû agiter les noms des deux artistes
dans un chapeau pour décider qui ferait la notice sur Monet et qui ferait celle
sur Rodin. Gustave Geffroy se vit adjuger la notice sur Rodin. L’exposition se
passa mal. Quand Monet apporta ses 145 toiles, Rodin avait déjà pris possession
des lieux avec ses 36 sculptures sans se soucier de son colocataire. Il l’avait
même fait volontairement et proclamé haut et fort : « Je me fous de
Monet, je me fous de tout le monde ! Je ne m’occupe que de moi. »
(Mots rapportés par Edmond de Goncourt). 160 €
MONTHERLANT,
BANINE, JÜNGER & MARGUERITE YOURCENAR
44.- [MONTHERLANT] Umm-El-Banine ASSADOULAEFF dite BANINE [1905-1992], femme de lettres de langue française
d’ascendance azérie, amie de Jünger, de Malraux et de Montherlant. Quatre
lettres adressées à Montherlant, auxquelles on joint le duplicata
dactylographié d’une réponse de Montherlant. 1) LA signée « Banine »,
21 janvier 1952 ; 1 p. in-4°. Elle lui demande s’il a bien reçu « le petit livre de Jünger qu’il a fait
imprimer à l’intention de ses amis » et qu’elle a fait déposer à la
N.R.F. Jünger lui a dit toute son estime pour le caractère et l’œuvre de
Montherlant et il s’inquiète de ce que ce dernier aurait pu s’offusquer de
paroles de Henri Thomas notées dans son journal. Banine s’est empressée de le
rassurer : « Si les hommes
célèbres permettaient à chaque critique de les blesser, il ne leur resterait
plus qu’à chercher refuge dans la tombe. Jünger lui-même en sait qque chose,
lui qui a été si violemment attaqué en France comme en Allemagne. »… - 2)
LAS, 21 juillet 1952 ; 1 p. ½
in-4°. Après avoir réagi aux dernières pages de Montherlant publiées dans la Table Ronde et à un article de Mauriac,
elle confesse toute l’admiration que lui inspire Marguerite Yourcenar : « Je pense avec admiration et beaucoup
d’envie à la femme la plus étonnante que je connaisse, à son équilibre
intérieur qui semble bâti sur un roc inébranlable — à Marguerite Yourcenar. Vous avez lu sans doute son admirable
Hadrien. Encore une rencontre qui ne m’a pas déçue. Cette femme est sympathique
malgré des caractéristiques qui auraient pu la rendre odieuse. Elle a fait une « très forte
impression » même à Jünger, ce qui est un tour de force. »… - 3)
Henry de MONTHERLANT. Duplicata d’une
lettre dactylographiée, Paris, 24 juillet 1952 ; 1 p. in-4°.
Montherlant ne partage pas l’avis de Banine sur Les Mémoires d’Hadrien : « Je n’ai pas lu le livre de Mme
Yourcenar. L’histoire romancée est pour
moi de la ratatouille, quand la vie est si belle, et si belle l’histoire
honnête, qui ne prétend qu’à la reconstituer. Et tous ces gens qui ont
besoin de Mme Yourcenar pour découvrir les Grecs et les Romains, et que ces
Grecs et ces Romains après tout n’étaient pas si bêtes, me semblent porter
surtout un triste témoignage sur l’inculture et l’ignorance de notre
époque. »… - 4) LS avec
post-scriptum autographe, 28 juillet 1952 ; 1 p. in-4°. Banine défend
l’œuvre de Yourcenar : « ce
livre n’a rien de commun avec les histoires romancées : c’est en quelque
sorte la reconstruction d’une âme, faite avec une intelligence, une subtilité et un lyrisme qui mettent M.Y.
au rang d’un grand écrivain. Des hommes de grande culture (il ne s’agit pas de
moi, ma culture étant des plus
défectueuses grâce à cette chère révolution qui m’a débarrassée, toute petite
encore, des études classiques) se repaissent de ce livre et nullement pour
y apprendre l’histoire grecque ou romaine.
Je vous assure que vous auriez tort de ne pas le lire. » En
post-scriptum, elle lui apprend que Marguerite Yourcenar l’admire
beaucoup : « vous me répondriez
sans doute que cela vous est égal. Mais là encore vous auriez tort :
l’admiration d’un écrivain comme elle n’est pas négligeable. » - 5) LAS, 30 décembre 1953 ; 1 p.
in-8°. Belle lettre d’admiration. « ce que j’aime décidément le plus chez vous, ce n’est pas
tant votre qualité de grand écrivain […] que votre attitude devant la vie, votre personnage. Que de résonnance
il éveille en moi, ce qui m’étonne car enfin comment peut-on être attiré à la
fois et si fort par un Tolstoï et un Montherlant ? aux
antipodes l’un de l’autre. Mais un point de commun entre vous et il y en a
d’autres : votre mépris de l’argent, votre étonnement de voir l’immense
majorité des hommes consentir à tant de bassesse pour s’en procurer. Et si
j’aime moins votre mépris pour l’humanité, je ne le comprends que trop, étant
littéralement ravagée de mépris et m’en défendant en vain. »… 200 €
45.- Antoine-Amédée-Marie-Vincent
Manca de Vallombrosa, marquis de MORÈS [1858-1896], aventurier er activiste
politique, fondateur avec Edouard Drumont de la Ligue Antisémitique de France,
collaborateur de la Libre Parole, il
est tué le 9 juin 1896 à El Ouatia dans des circonstances mal élucidées alors
qu’il tentait de rassembler des tribus touaregs pour s’opposer à l’hégémonie
anglaise en Afrique. LAS, Khenchela
(Algérie), 17 décembre 1895, à Jean
Drault, rédacteur à la Libre Parole, actuellement
à Alger ; 6 pp. in-8° (défauts,
un feuillet abîmé). Le marquis de Morès se trouve en Algérie où il a fondé le
Parti antisémite algérien. Il est très pris par ses activités et demande à Jean
Drault de se charger de deux affaires pour lui : « la première est celle des bataillons d’Afrique, la seconde celle
des convoyeurs kabyles. En ce qui concerne la première, il y a ici une
véritable conspiration méthodiste pour nous fermer la route d’Egypte par les
Touaregs et soulever les populations au moment d’une guerre — d’autre part sous prétexte d’humanité
certains écrivains (Séverine) !!! et Rochefort
dans l’Intransigeant ont reproduit des correspondances extraordinaires
— le résultat avec la lâcheté actuelle a été de désorganiser la discipline sur
les frontières, et d’outrager sans qu’ils puissent se défendre des héros comme
le commandant Drude et le capitaine Panard chez qui je suis, mon ami qui
depuis 18 ans fait campagne au Tonkin, au Dahomey, partout où l’on se bat à la
tête de la compagnie franche. Le corps d’officiers et de sous-officiers est
dégoûté et cette campagne est une aussi mauvaise action que celle contre l’amiral Gervais. Faites une enquête et
vous rendrez service au pays. Occupez-vous
aussi des convoyeurs Kabyles. C’est un crime contre l’humanité que nous
paierons s’il n’est atténué. » Morès est trop occupé pour se
charger de cette affaire : « Je […] ne puis prodiguer mon temps et
mes cartouches, je n’ai que le nécessaire et il faut se presser pour ne pas
arriver trop tard. » Il
a annoncé la visite de Drault à plusieurs personnes dont il donne la liste. « Voyez aussi le colonel de Polignac à
la Bouzareah et allez au lazareth de Matijon. » Il annonce son départ
pour le sud la semaine suivante. 150 €
46.- NADAR, A
terre & en l’air… - Mémoires du Géant. Avec une traduction par M.
Babinet, de l’Institut. Paris, E. Dentu, libraire-éditeur, 1865. 2e
édition. Hors-texte sur double page : le traînage du Géant tombé à Frehren en Hanovre, le 19 octobre 1863. Demi-chagrin
citron in-12, dos à 5 nerfs, tranches dorées, 439 pp. ; premier plat de
couverture illustré conservé. Exemplaire enrichi d’un envoi autographe signé
de l’auteur : « A mon ami
A. Ferreira. Nadar. Mars 1865. » 150 €
47.- NAPOLÉON 1er
[1769-1821], empereur des Français. LS
« Np » dictée à Meneval, Paris, 9 mars 1809, au général Henri Jacques Guillaume Clarke, ministre de la Guerre ;
¾ p. in-4° (tache d’encre au bas du document). Ordre de compléter des régiments
du Corps Oudinot pendant la campagne d’Allemagne. « Je vous envoie un état que j’ai fait dresser du corps du Général Oudinot. Faites le rectifier, s’il y a erreur, & faites
vérifier s’il manque effectivement 100 hommes au 16e legere, 100
hommes au 96e, 100 hmes au 54e, 112 hommes au
26e legere, et en tout 1100 hommes. Proposez moi les moyens de la
compléter. Faites mettre à chaque division les noms des généraux qui commandent
les brigades, les noms des adjudans, commandans, des commandans du génie, de l’artillerie
et des commissaires des guerres, afin que je m’assure qu’il ne manque rien à
ces deux divisions. »…
1000 €
48.- [NAPOLÉON 1er] *** [SAINT-DIDIER], Nuits de l’Abdication. Seconde édition.
Paris, Plancher, rue Serpente & Delaunay, libraire au Palais-Royal,
septembre 1815. In-12 br. 48 pp. sous couverture d’attente (étiquette de la
librairie Raymond Clavreuil). Expl. légt défr. L’E.O. avait paru le mois
précédent et ne comportait que 43 pages. RARE. 100
€
49.- Irène NÉMIROWSKY
[1903-1942], romancière d’origine ukrainienne et de langue française. LAS, Paris, 7 février 1935, à un
rédacteur de la Revue des Deux
Mondes ; 1 p. in-8°. Elle demande si le titre Jour d’été conviendrait à la nouvelle qu’elle a envoyée à la revue.
« Il ne témoigne pas d’une
imagination exhubérante [sic], mais
les titres les plus simples sont les meilleurs, ne le pensez-vous pas ?
Donc, s’il plaît à M. Doumic, que ce
soit Jour d’été. » Elle a été touchée des « aimables paroles » de Doumic à son égard et prie son
correspondant de le remercier. — On
joint : Une photographie d’amateur, format 6,5 x 11 cm, prise le
12 juillet 1922, représentant un groupe de personnes parmi lesquelles, assise
au premier plan, à l’extrême droite, la jeune Irène Némirovsky âgée de 18 ans.
Elle fait partie des neuf qui ont apposé leur signature au dos de la photo. Les
autographes d’Irène Némirovsky et les documents la concernant sont très rares.
400 €
50.- OBALDIA (René de), Théâtre. Paris,
Grasset, 1966-1975. Six volumes in-8° br. de 269, 219,
205, 213, 245 et 351 pp. : Genousie
– Le satyre de la Villette – Le général inconnu – L’air du large – Du vent dans
les branches de Sassafras – Le cosmonaute agricole – Sept impromptus à loisir –
La damné – Les larmes de l’aveugle – Urbi et orbi – Deux femmes pour un fantôme
– La baby-sitter – Classe terminale – Le banquet des méduses - … et à la fin
était le bang – Monsieur Klebs et Rozalie. (Moisissure sèche affectant une
petite zone des 20 dernières pages du tome III). E.O., exemplaires de service
de presse ; cinq de ces six volumes sont enrichis d’envois au critique
Jean-Louis Bory : Tome I : « Pour
toi, tout particulièrement, Jean-Louis, ce THEATRE de Monsieur le Comte. Affectueusement. René. – Tome III : « Pour toi, Jean-Louis, superbe et
généreux, ces SEPT IMPROMPTUS A LOISIR (six !)
mais il y a, cette fois, une volte-face…).
Affectueusement. René. 23/2/67. » - Tome IV : « Pour toi, Jean-Louis, ces deux mots
de Monsieur le Comte. Eperdument. René. » - Tome V : « Pour toi, Jean-Louis, ce THEATRE avec l’affection toujours vierge de ton
centenaire. René. 24/10/73. » - Tome VI : « Pour toi Jean-Louis 1er. Ton Obaldia VI !
Affectueusement. René. Sept. 75. »
120 €
51.- George ONSLOW [1784-1853],
compositeur. LAS, 12 janvier 1831, à M. Monestier ; 1 p. in-8°.
Lettre d’affaires. Il le remercie pour l’envoi d’une note et le prie « de vouloir bien [lui] préparer en blanc une procuration au
moyen de laquelle la personne représentant [sa] mère puisse toucher tous les semestres à courir de la somme
empruntée par M. de Chabrol à Volvic. Cette forme de rédaction évitera la peine
d’envoyer une nouvelle procuration tous les six mois. »… RARE. 100 €
52.- [Pierre-François PALLOY
(1755-1835), dit le Patriote, entrepreneur de travaux publics, démolisseur de
la Bastille.] Manuscrit d’un poème
(peut-être incomplet), s.d. [1822 ?] dicté ou recopié ; 4 pp.
in-folio, vignette en tête ornée des portraits de Henri IV et de Louis XVIII se
faisant face. Poème écrit à l’occasion de la mort de son oncle Chrétien, décédé
à Condrieux le 2 juillet 1822. Curieuse pièce dans laquelle l’évocation du
défunt est souvent éclipsée par une sorte de plaidoyer pro domo et par le rappel de souvenirs parfois douloureux de son
existence mouvementée. Il termine par un vibrant hommage à son épouse, qu’il
compare à une Baucis dont il serait le Philémon. Plusieurs notes en bas de page
ajoutent d’intéressants détails biographiques aux 66 vers mirlitonesques de ce
poème. Il rappelle ainsi le décret de l’Assemblée nationale qui lui accorda le
titre de Patriote et lui alloua une portion de terrain de la Bastille, la
décoration de la Fleur-de-Lys qui lui fut attribuée par Louis XVIII, les ennuis
dont il fut victime sous la Terreur, la ruine dans laquelle se terminait son
existence, etc.
« J’ai chanté ma patrie et glorieux
comme elle,
Je triomphais de m’être attiré ses regards.
J’ai cru les mériter, de malheureux hazards
En proscrivant mes droits à cette
récompense,
N’ont pas du les proscrire à la
reconnaissance
D’un Roi, trop malheureux le digne
successeur
A promis à son âme un espoir plus flatteur.
L’envie en frémira, mais enfin la Justice
Doit m’accorder au moins l’honneur d’un
sacrifice,
Par tout j’ai fait du bien, et du bien que
j’ai fait
Le souvenir suffit à mon cœur
satisfait. »… CURIOSITÉ. 180 €
53.- [Louis PASTEUR] Grand Festival au profit de l’Institut
Pasteur organisé par la conférence « Scientia » sous le patronage
de MM. Chevreul, F. de Lesseps, Léon Say, général de Nansouty, Berthelot,
Renan, P. de Brazza, Janssen, Dr A. Richet, Emile Augier, A. Dumas fils, V.
Sardou, Sully-Prudhomme, Ambroise Thomas, Charles Gounod, Reyer, Massenet, C.
Saint-Saëns, L. Delibes, J. Claretie, Carvalho, Porel… Plaquette in-4° (23 x 32
cm) de 16 pp. sur simili Japon, s.d. (mai 1886). Ornements et portrait de
Pasteur par Félix Régamey. Nombreux fac-similés des savants, écrivains,
musiciens et artistes ayant apporté leur concours à cette œuvre. Exemplaire
enrichi d’un envoi a. s. de Pasteur sous son portrait : « A Mademoiselle Isaac. Très
reconnaissant souvenir du 11 mai 1886. L. Pasteur. » 260 €
54.- Marcel PETIOT
[1893-1946], médecin et criminel, condamné à mort pour l’assassinat de 27
personnes pendant l’Occupation. Minute
autographe d’une lettre adressée au
ministre des pensions, Paris, s.d., au verso de
son papier à en-tête ; 1 p. pet. in-4°. Avant de
sombrer dans la criminalité en série, Marcel Petiot avait la réputation d’être
un médecin serviable et dévoué à ses patients. Ainsi, le document que nous
proposons n’est autre qu’un modèle de lettre écrit pour l’un d’eux, qui n’avait
pu faire valoir jusqu’ici les bonnes raisons d’obtenir une revalorisation de sa
pension. « Je suis titulaire d’une
pension de réforme à 10% pour reliquat de dysenterie, crises abdominales
douloureuses avec diarrhées sanguinolentes, douleurs dans la fosse iliaque
droite, corde colique, etc. En outre je présente des varices extrêmement
pénibles dont l’importance a d’ailleurs été établie par expertise le … à 15%
documentaire parce qu’à ce moment je n’avais pas présenté les pièces établissant
que ces varices résultent des fatigues du service […] Je vous serais très obligé si vous vouliez bien me préciser sous quelle
forme je dois faire la demande de révision puisque la commission de Réforme se
refuse à examiner lesdites pièces. »… — On joint : Un
journal et deux revues relatant les crimes de Marcel Petiot. 1) Le Petit Parisien du mardi 14 mars 1944.
A la une : Dans l’hôtel de la rue Le
Sueur le docteur Marcel Petiot soumettait ses victimes à une mort lente et
affreuse. – 2) Toute la vie, du
23 mars 1944 : Un feu de cheminée
ruine la carrière d’un assassin. – 3) Actu,
n° 94, 23 avril 1944 : Emule
inattendu de Nostradamus… le Dr Petiot entre deux ordonnances ou deux crimes,
écrivait… des prophéties. Tous ces articles sont illustrés de nombreuses
photographies. 500 €
55.- PHILIPPE d’ORLÉANS [1674-1723],
régent de France. Paraphe avec le mot
autographe « bon » au bas d’une supplique du comte François
d’ESTAING, lieutenant général des armées du roi et chevalier des ordres de Sa
Majesté, gouverneur des pays Messin et Verdunois, de Châlons en Champagne et
Douai en Flandre, 14 mai 1717 ; 1 p. pet. in-4°.
Le comte d’Estain [ou d’Estaing] « représente
qu’il ne pût recevoir les app.s qui lui sont dûs pour l’année 1716
en qualité de cidevant Lieutenant général du Verdunois, parce qu’il n’a pas
fait renouveller ses provisions dans letems qu’il estoit encore pourveu, de
laquelle il s’est demis au mois de Juillet de lad. année
en faveur de Mr son fils. Comme on ne peut lui accorder le
renouvellement des d. provisions Il suplie tres humblement S.A.R. de lui
accorder par gratification extraord.re lesd. appointemens
montant à 1800 livres dont le fonds est fait. » 120 €
56.- André PIEYRE DE MANDIARGUES
[1909-1991], écrivain. LAS, Paris, 5
juin 1980, à André Parinaud ; 1
p. in-8°. Il est trop fatigué et trop occupé pour répondre sérieusement à son
enquête. Toutefois, il lui fera cette réponse dense et laconique : « je
n’aime vraiment beaucoup que le Palais Idéal du facteur Cheval, à Hauterive,
peut-être un peu antérieur à 1890, et
puis la Tour Eiffel (à cause d’Apollinaire et de Delaunay !). »… 90 €
57.- [Édouard PIGNON] Édouard
Pignon – 50 peintures de 1936 à 1962 – Propos de Pignon sur la peinture et la
réalité. Paris, Galerie de France, s.d. In-4° relié pleine toile verte sous
jaquette (défraîchie), 65 pp. Exemplaire numéroté (bon état intérieur) enrichi
d’un grand dessin original aquarellé en
couleurs de Pignon sur double page signé
et daté (1963) offert à ses amis Jacques et Lida. Ce dessin, de format 30
x 45 cm, représente un chevalier en armure sur son cheval cabré. Les 50
œuvres reproduites en N&B ou en couleurs sont contrecollées sur les pages
du livre à l’intérieur du texte. — Joint :
Édouard Pignon – Paris, Galerie
de France, 1960. Plaquette gd in-4° à l’italienne éditée à l’occasion de
l’exposition des œuvres de Pignon (22 mars – 20 avril 1960). Tirage à 1500
expl. num. Textes et photographies d’Hélène Parmelin. 450 €
58.- Eugène POTTIER
[1816-1887], dessinateur sur étoffe, communard et chansonnier, auteur des
paroles de l’Internationale. LAS, Paris, 6 août 1845, à un médecin,
probablement ; 1 p. in-8°. Il
emmène à la campagne sa petite fillette, « qui
n’est pas encore remise, et aux Pyrénées, [sa] femme, dont la santé [l’]occupe un peu plus
sérieusement. » Il prie son correspondant de « pardonner aux embarras d’un double voyage l’oubli
momentané » de sa dette : « Je
ne parle que de celle d’argent : croyez bien, cher monsieur, que nous
n’oublierons jamais celle que nous ont fait contracter vos excellents soins
auprès de notre enfant. »… 100 €
59.- [POUCHKINE] Georges-Charles
de HEECKEREN d’ANTHÈS [1812-1895], officier et homme politique français, il
ne doit sa célébrité qu’au duel au cours duquel il tua son beau-frère, le poète
russe Pouchkine. LAS écrite à la 3e
personne, Paris, Hôtel de Hollande, 18 février, à M. Bance ; 1 p. in-8° oblongue. Il le prie de vouloir bien « lui confier les livraisons de la
Galerie de Florence afin qu’il puisse les examiner d’avance. Il envoie à cet
effet son domestique avec la voiture, s’engageant à donner demain réponse s’il
compte les garder pour le prix indiqué. »… PEU COMMUN. 90 €
60.- Francis POULENC
[1899-1963], compositeur. Carte postale
a. s. (vue de sa propriété), s.d., à Madame Heugel ; 1 p. in-12. « Ne rentrant à Paris que le 15 je vous
adresse tous mes regrets pour vendredi prochain auxquels je joins mon très
respectueux souvenir. Fr. Poulenc. » — On joint : Une
carte de remerciements bordée de noir envoyée par les familles Manceaux et
Seringe à la famille Heugel pour le message de sympathie adressé lors de la
mort de Poulenc. 150 €
61.- [REVUE] LA FEUILLE. Collection complète des 25 numéros de la revue de Zo d’Axa parus du 6 octobre 1897 au 28
mars 1899. Paris, 1900. In-folio en ff. sous chemise
orange illustrée. Dessins de Steinlen (nos 1 à 7 — les deux
premiers en couleurs —, 11 et 12 sur double page, 14 à 18, 20, 22 à 25), Willette
(n° 8), Léandre (n° 9), Hermann-Paul (nos 10 et 13), Couturier
(15), Anquetin (19) et Luce (21). Bords insolés fragiles. — On joint : La rare
affichette publicitaire (état de neuf) pour Les
Feuilles de Zo d’Axa, imprimée en rouge et noir (30 x 44 cm). 450 €
HENRI-PIERRE ROCHÉ
ENTHOUSIASMÉ PAR LOUISE DE VILMORIN
62.- Henri-Pierre ROCHÉ
[1879-1959], romancier et marchand d’art, auteur de Jules et Jim. LAS, [Sèvres],
3 janvier 1958, à André Parinaud ;
2 pp. in-8° à l’italienne. Il le remercie pour « les entretiens avec Louise
de Vilmorin, qui étaient une sorte de chef-d’œuvre, très personnel, et qui
nous ont ravis, ma femme et moi — c’était
égal au moins à « Léautaud » [allusion aux entretiens de
Léautaud avec Robert Mallet] —. J’espère qu’ils ont fait sensation !
C’était un duo magnifique, si allant et nuancé, j’étais emballé, je
voulais lire tous ses livres à elle et voir des photos d’elle, et lui
envoyer mes romans ( ?).
Quel ton elle a ! et puis j’ai eu des bronchites… » Il a souvent
pensé envoyer des articles à Parinaud, mais sa maladie l’a fait renoncer. Pour
terminer, il le félicite, ainsi que Jacques Laurent, pour la qualité de sa
revue Arts, « qui s’impose — ce
n’était pas facile. »… 180 €
63.- Edouard-Augustin-Edouard
Roger de Bully dit ROGER DE BEAUVOIR
[1806-1866], journaliste, écrivain et voyageur. LAS, s.d., à Nadar ; 1 p. in-8°. Une lecture importante l’empêche de se
rendre lundi « à cette charmante
séance. Ne m’en veuillez pas je vous en prie et gardez-moi votre bonne volonté.
J’irai vous voir bientôt. »… 45 €
64.- Pierre-Paul Roux dit SAINT-POL-ROUX [1861-1940], poète. Sonnet autographe, Le Génie, signé et daté, Camaret, Manoir de Cœcilian, 17 août
1936 ; 1 p. in-4° contrecollée sur carte souple. Selon Mikael Lugan, ce
poème n’a pas été publié du vivant de son auteur. Il a paru pour la première
fois en revue dans Les Lettres, en
1945, puis dans Le Journal des Poètes, l’année
suivante. Rare manuscrit autographe, les archives du poète ayant été détruites
lors de l’incendie de sa maison.
« Par-dessus l’atavique esclavage de
l’heure
Il s’exalte en archange de la liberté,
Les globes aiguisant la foi qui les
effleure,
Et ses ailes l’emportent dans l’éternité.
Comme il ne faut qu’ici la vieille race
meure
En ses silos taris par la stérilité,
D’un bond il va forcer la subtile demeure
Où les dieux thésaurisent la
fertilité. »… 350 €
65.- Camille SAINT-SAËNS
[1835-1921], compositeur. LAS,
[Paris, 19 janvier 1874], à son ami le
sculpteur Georges Tattegrain ; 4 pp. in-12, env. cons. Que Tattegrain
se rassure, il ne mérite pas tant de sollicitude, le refroidissement qui
l’avait mis en « piteux état »
n’a pas eu de suite et il se porte à merveille. « Quant à ce pauvre Lamarche
[Alfred Lamarche, ami de la famille et témoin de Saint-Saëns lors de son
mariage avec Marie Truffot en 1875 ; le musicien lui dédia son Trio pour piano et cordes n° 1], c’est une autre affaire. Je le trouve en
meilleur état que l’été dernier, mais il ne se relèvera jamais complètement, je
le crains. Sa femme prend les événements avec une énergie admirable et lui
remonte le moral le mieux qu’elle peut… » Il va les voir de temps en
temps. « Il est vraiment bien à
plaindre et cela est bien attristant pour nous. » Il donne aussi des
nouvelles de ses amis Seghers, qui ne vont pas mal, « sauf la goutte qui a mis les doigts de notre excellent ami [F.-J.-B. Seghers, violoniste et chef
d’orchestre, fondateur de l’Union Musicale, 1801-1881] dans un état pitoyable. Il
s’obstine à jouer du violon quand même et d’après la description qu’il m’a
faite de cet exercice, je suppose qu’il doit être aussi douloureux pour les
auditeurs que pour les exécutants. »… 350 €
66.- Henri SAUGUET [1901-1989],
compositeur. Partition du ballet : Les
Cinq Etages. Argument de Rodolphe Liechtenhan et Wazlaw Orlokowsky d’après
les Cinq Etages de Béranger.
Chorégraphie originale de Wazlaw Orlokowsky. Paris, Au Ménestrel – Heugel &
Cie, 1957. Bradel demi-percaline vert lierre pet. in-4°,
70 pp. ; premier plat de couv. cons. E.O. Envoi
a. s. de l’auteur à l’un des deux dédicataires de l’oeuvre : « Pour François Heugel avec la
reconnaissante amitié d’un de ses « auteurs », heureux et fier
d’appartenir à son illustre maison. En souvenir, Henri Sauguet. Paris,
21-1-59. » — On joint : Une photographie de Sauguet en
compagnie du chorégraphe, du scénariste et de deux danseuses (format 10 x 14
cm) et deux photographies du ballet (13 x 17,5 cm). Bel ensemble. 160 €
67.- [MAISON DE SAVOIE] Charles-Emmanuel
[1562-1630], duc de Savoie et prince du Piémont. PS, Turin, 14 octobre 1581, en italien ; 1 p. in-folio
oblongue (bords effrangés, petits manques sans perte de texte, restaurations).
Mandement à ses trésoriers pour mettre sous séquestre les sommes dues au sieur
Calligaris et ne s’en dessaisir qu’avec son accord. 150 €
68.- [Rabîndranâth TAGORE (1861-1941),
philosophe indien, prix Nobel de Littérature 1913] TABOR, dessinateur allemand. Dessin
original au crayon de couleur signé, portrait de Rabîndranâth Tagore, Hambourg,
s.d. ; format 16 x 20 cm exécuté sur feuille 27 x 32 cm. La signature de
l’écrivain sous le dessin est probablement apocryphe. 100 €
VERLAINE REFUSÉ
AU FIGARO !
69.- [Paul VERLAINE] Paul
BONNETAIN [1858-1899], écrivain, journaliste et voyageur. Carte aut. signée,
Paris, 26 juillet 1888, à Paul
Verlaine ; 1 p. ½ in-12, en-tête Le
Figaro – Supplément littéraire, env. cons. Refus de publier un manuscrit du
poète. « J’ai l’honneur et le regret
de vous retourner votre manuscrit que M. Périvier vient de me rendre en me
chargeant de vous transmettre ses propres regrets. Mais j’espère bien que vous
prendrez bientôt votre revanche … »
300 €
70.- Louise de VILMORIN [1902-1969],
femme de lettres. LAS, Paris, 30,
Villa-Dupont, 30 décembre 1952, à la
décoratrice Madeleine Castaing ; 1 p. ½ in-8° au trèfle dessiné en
tête. Vœux pour la nouvelle année. « Toutes mes pensées les plus tendres
vont vers toi, ton cher Marcellin et vos enfants, et je vous envoie à tous deux
mes vœux affectueux et fidèles pour la nouvelle année. Après trois semaines
vraiment très pénibles j’ai enfin quitté l’hôpital Américain et suis installée
chez mon frère André à Paris. » Sa belle-sœur est partie pour les
Indes et ils forment tous les deux « un
petit ménage patient et paisible ». Elle aimerait voir les Castaing :
« Appelle-moi et venez dîner un soir
au pied de mon lit. Tu sais que je vous aime et vous aimerai toujours, alors mettez vite vos ailes et volez vers moi qui
pense tant à vous et aux jours heureux où la vie, plus clémente alors, me
permettait de passer souvent des heures auprès de vous. »… 150 €