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Stephen King politique :
LES ALÉAS D'UNE DÉMOCRATIE
Un des mythes porteurs
de notre époque, actuellement en perte de vitesse, a été la construction
d'une société plus juste et soucieuse à la fois des intérêts des individus
et de la collectivité. L'utopie est ancienne, mais pour la première fois
dans l'histoire, il a été possible à notre époque de faire vivre des millions
d'hommes dans l'espérance de la construction d'une société politiquement
meilleure, permettant l'épanouissement d'un homme nouveau.
Il paraîtra insolite d'étudier l'oeuvre de King dans cette perspective. Mais
il y a des éléments tellement intéressants dans The Stand1[Le
Fléau2],
qu'il serait dommage, au moment où les élections aux U.S.A. attirent l'attention
du grand public sur la situation politique de cette démocratie, de négliger
le sociologique de l'oeuvre au seul profit de l'action et du conflit entre
les forces du bien et celles du mal.
MISE EN SITUATION HISTORIQUE DU PROBLÈME POLITIQUE.
Influence directe : Stewart.
King a été influencé3 par
un roman de Georges R. Stewart4 :l'humanité
détruite par une épidémie de peste, les survivants s'orientent vers un mode
de vie pastoral et écologique.
King reprend ce thème. L'humanité a été pratiquement anéantie par une super-grippe:
à l'origine, une fuite de cultures virales provenant d'un Centre de Recherches
Biologiques fonctionnant dans le cadre d'un possible conflit bactériologique.
Tous les moyens matériels de la civilisation sont pratiquement intacts. Les
survivants vont reconstruire leurs sociétés5.
King va donc être amené à décrire la réorientation politique de ces sociétés
face aux bouleversements intervenus. Certains survivants essaient de construire
une société démocratique (2è partie); d'autres subissent une tyrannie (3è partie).
Influence indirecte : J.J. Rousseau.
La situation dans laquelle
King place les survivants est celle d'un Rousseau moderne à l'orée du XXIè
siècle.Les hommes primitifs décrits par Rousseau6 vivaient
simplement des produits de la nature, suivaient leurs seuls instincts et
leur conservation, sans aucune servitude. S'associant entre eux librement
par familles, ils subvenaient personnellement à leurs besoins dans l'indépendance
et l'autonomie. L'invention de l'agriculture et de la métallurgie a entraîné
la division du travail, la hiérarchie, et les inégalités économiques, à la
suite de l'appropriation par certains des richesses produites. La propriété
privée est ainsi née à la fois de l'inégalité des rendements individuels
et des rapports de force dans la répartition des biens.
Les puissants imposèrent une législation destinée à maintenir leurs privilèges
et à protéger leurs richesses: le pouvoir civil fut organisé à leur profit
et créa un fossé entre les peuples et leurs dirigeants. L'avènement d'un pouvoir
autoritaire maintint et aggrava l'injustice sociale par l'oppression politique
et le despotisme, assujettissant désormais les hommes au travail, à la servitude
et à la misère.
Cette thèse de Rousseau est à l'origine d'une bonne partie de la pensée sociale
du XVIIIè au XXè s. Elle a inspiré aussi bien les socialismes, les communismes
(comment créer une organisation sociale meilleure?), que les écologismes (comment
vivre au mieux avec le milieu naturel?).
Similitudes et différences.
Matériellement, la situation
est la même, nonobstant les différences de nature des biens (les uns naturels,
les autres artificiels en grande partie): d'un côté les produits de la nature
à disposition; de l'autre, les magasins, les entrepôts et les habitations
bourrés de produits qu'il n'y a qu'à ramasser.
De même, politiquement, dans cette société de 1990, tous sont théoriquement
égaux: il n'y a plus de structures sociales, pas de hiérarchie, il ne faut
pas travailler et les biens sont à la disposition de tous.
La différence entre la situation des hommes imaginés par Rousseau et les survivants
de King est que les premières sociétés se sont constituées en une évolution
historique très lente; nos contemporains vont agir poussés par la pression
et l'urgence d'un conflit.
Apollon
et Dionysos.
En effet, la société apollinienne
(ainsi nommée par King)7,
installée à Boulder, Colorado, va essayer d'instituer un régime démocratique,
avec des hommes d'action de bonne volonté, aidés par un sociologue averti.
Cette société à venir n'est pas libre de ses choix: elle ne pourra pas se bâtir
dans l'utopie, mais devra s'établir sous la pression des événements.
Elle est en effet menacée par le camp dionysiaque8,
installé à Las Vegas, Névada, qui va chercher à la détruire.
UN GROUPE APOLLINIEN S'ESSAIE À LA DÉMOCRATIE.
Mise en place des institutions.
Le
regroupement.
Les survivants de Boulder se sont regroupés autour de Mère Abigaël. "La
vieille femme était un pôle d'attraction autour duquel les autres peu à peu
se regroupaient (p.
642)9.
Ils se trouvent dans une situation d'anarchie, peuple sans gouvernement. Dans
cet état de vie sans contraintes sociales, sans lois et sans organismes chargés
de les faire respecter, que va devenir la communauté, qui grossit lentement,
de plusieurs centaines à plusieurs milliers d'individus?
"Une société va se former (...). De
quel genre ? Impossible de le savoir"(p.
643). "J'aime à croire que la plupart des gens sont bons"(p.
647).
"Les gens avaient changé. La société qui s'était formée dans cette
petite ville ne ressemblait en rien à celles qui avaient existé avant (...). Hommes
et femmes vivaient en couple, sans désir apparent d'instituer à nouveau la
cérémonie du mariage. Des groupes de personnes habitaient ensemble en petites
sous-communautés, comme des communes. Les disputes étaient rares. Tout le monde
semblait s'entendre (...). Boulder
avait fait table rase"(p.
685).
Certains travaillent, d'autres pas: "le problème des travailleurs,
c'est qu'ils travaillaient tous sans méthode, quand l'envie leur en prenait (...). Plutôt
bordeliques"(p.
688). "Les gens étaient pleins de bonne volonté; ce qu'il leur fallait,
c'est quelqu'un pour coordonner leurs activités, pour leur dire quoi faire"(p.
688).
Le danger.
L'autre groupe, dirigé par Randall, est une menace mortelle. Comment faire
face à cette menace? "C'est le bordel ici (...). On
ne peut pas rester comme ça sans rien foutre...Au risque de se réveiller un
beau matin et de voir débouler ce type à la tête d'une colonne de tanks"(p.
648).
La riposte.
Un petit noyau d'hommes et de femmes résolus, constitué autour d'Abigaël, va
essayer d'organiser la communauté : "recréer l'Amérique. Notre petite
Amérique"(p.
648). "Nous ne sommes plus qu'une bande de survivants, sans aucun
gouvernement. Un méli-mélo de groupes d'âges, de groupes religieux, de groupes
de classe, de groupes ethniques" (p.
649).
Abandonnés à eux-mêmes, que vont-ils devenir? "Au bout de quelque
temps, ils vont commencer à réagir avec leurs tripes...Nous devons les prendre
en mains avant qu'ils ne se réveillent et fassent des bétises"(p.
649).
Les intentions.
Les rescapés sont fatigués, ont peur, ne savent pas ce qui va arriver.
En l'absence d'institutions, tout est possible. "Si quelqu'un se levait.(...) et
proposait de donner le pouvoir absolu à Mère Abigaël, avec vous et moi comme
conseillers, (...) la
proposition serait adoptée à l'unanimité. Personne ne se rendrait compte que
nous viendrions de voter la première dictature américaine"(649).Il
faudrait créer une "démocratie directe"comme "au début de
la colonisation"(p.
649). Tout est à faire.
"Le gouvernement est une idée...Rien
de plus, une fois que vous supprimez les fonctionnaires10.
(...) C'est une doctrine, rien d'autre qu'un sentier que l'habitude a gravé
dans nos mémoires"(p.
649).
"Il faut donner la "priorité absolue à l'organisation et au gouvernement"(p.
648). "Nous sommes des hommes politiques, les pionniers d'une nouvelle
époque"(p.
713). "Autorité, organisation. Comme ces deux mots allaient bien ensemble", pense
Nick, et comme il "n'aimait pas ces deux mots"(p.
668).
Les moyens d'action.
"Nous avons un atout: l'inertie culturelle. La plupart des gens
qui sont ici croient encore au gouvernement représentatif, à la république
- ce qu'ils pensent être la démocratie. Mais l'inertie culturelle ne dure jamais
longtemps"(p.
649).Il est décidé que, lors d'une assemblée générale, le noyau organisateur
fera ratifier l'esprit de
l'ancienne société (p. 649) par un "scrutin à mains levées"(p.
648), expression de la démocratie directe.
C'est ainsi que se verront ratifiées la Déclaration d'Indépendance, la Constitution
et la Déclaration des Droits du Citoyen11.
Sont également nommés dans la foulée les "représentants de la Zone Libre"de
Boulder (p. 649).
"En attendant, il fallait faire un tri. Jeter ce qui ne servait plus.
Faire une liste de tout ce qui fonctionnait encore (...). Il
y a quelque chose de maladivement terrifiant dans la facilité - presque la
volonté - qu'ont les choses de vouloir sauter en l'air. Le plus difficile est
de remettre de l'ordre"(p.
672).
La fin et les moyens : la magouille, déplorée, mais acceptée...
En bonne démocratie, une
société se fait par l'établissement d'un consensus à un contrat social où
la loi est, dans la clarté et la vérité, l'expression de la volonté générale
majoritaire12.
Dans cette perspective, le contrat est le consentement éclairé sur la réglementation
de la vie sociale et son observance.
Par tous les moyens...
Mais on est pressé: "Si nous commençons tout de suite, nous aurons
le gouvernement que nous voulons. Si nous attendons que la population triple,
nous aurons des problèmes"(p.
648). Face à l'adversaire, il faut recréer l'Amérique "par tous les
moyens, bons ou mauvais"(p.
648).
"Nous ferons en sorte que les représentants élus soient les mêmes
que les membres du Comité organisateur. Nous ne perdrons pas de temps, et nous
passerons au vote avant que les gens aient eu le temps de penser à leurs petits
copains. Nous choisirons nous-mêmes ceux qui proposeront leurs candidatures
et la proposition passera comme une lettre à la poste"(p.
650).
Et, malheureusement pour la démocratie naissante, en situation de guerre, tout
n'est pas bon à dire. Le Comité doit faire face au parti adverse: "sa
véritable mission secrète consiste à savoir comment faire face à cette force
connue sous le nom de l'Homme Noir"(p.
712).
Et les restrictions sont multipliées:
- "ne
pas parler des questions théologiques, religieuses ou surnaturelles concernant
l'Adversaire"durant
les séances du Comité (p. 712);
- ne
pas évoquer ce problème, pourtant de fond, à l'Assemblée Générale, le Comité
jugeant "nécessaire de garder le secret"sur
ces questions (p. 712);
- on
retarde une Assemblée Générale pour que les gens "ne parlent pas publiquement
de ce qui se passe à l'Ouest"(p.
852);
- on
va utiliser, dans les réunions publiques, tous les petits procédés des bateleurs
d'estrade qui bafouent les principes démocratiques élémentaires13;
- un
objecteur se manifeste (des objections éventuelles avaient été demandées),
mais il dérange Stu, qui fait "semblant de ne pas le voir"(p.
764);
- des
applaudissements sont provoqués: "le coup avait été arrangé"(p.
759);
- un
intervenant se produit à un moment convenu: "des éclats de rire saluèrent
son intervention (...). Glen14 souriait.
Il avait passé le mot à Rich une demi-heure avant l'assemblée, et Rich s'en
était admirablement tiré. Le vieux prof avait raison sur un point (...); dans
une grande réunion, il est souvent utile d'avoir étudié la sociologie"(p.
925);
- on
reporte le remplacement d'un dirigeant parce que celui qui se présente est
un incapable: "je suppose que les autres voudraient avoir le temps
de réfléchir"(p.
923).
Un exemple : la salubrité publique.
"Il faut remettre de l'ordre dans tout ce bordel"(p.
712): c'est tout le problème du mode d'exercice de l'autorité, de ses champs
et modalités d'application qui s'est imposé aux Représentants.
Tout a commencé avec l'élimination des cadavres. On a créé un Comité des inhumations,
dont la mission est de faire disparaître les milliers de cadavres qui sont
restés dans les maisons et qui vont bientôt pourrir à la saison des pluies.
Mais "afin de ne pas provoquer de panique",
il ne faut pas présenter ces inhumations comme un moyen de supprimer "un
danger pour la santé publique".
L'argument avancé pour entraîner l'adhésion de l'Assemblée sera de présenter
ces inhumations "comme une chose plus convenable"(p.
710).
Ce qui est formulé ainsi lors de l'Assemblée Générale qui vote la constitution
d'un Comité des Inhumations: "le mandat sera de donner une sépulture
décente aux personnes mortes de la super-grippe"(p.
757). Quand il faut des volontaires supplémentaires, le responsable ajoute
que "c'était par simple décence qu'on enterrait les morts, que personne
ne se sentirait complètement en paix tant que ça ne serait pas fait. Et si
on pouvait terminer avant l'automne et la saison pluvieuse, tant mieux"(p.
850). Langue de bois...
En fait de sépulture décente, on en est réduit à charger les cadavres dans
des camions et à les benner dans un trou: "les cadavres culbutaient...comme
une grotesque pluie humaine"(p.
802).
Les "habitants de Boulder ne sauraient jamais à quel point le danger
d'une nouvelle épidémie - une épidémie contre laquelle ils n'auraient pas été
immunisés - avait été réel"(p.
800).
L'érosion lucide, mais pénible des consciences.
"Nos intentions
sont pures",
dit un membre du Comité (p. 755). "L'enfer en est pavé",
ajoute quelqu'un. "De bonnes intentions, oui. Et comme nous semblons
tous nous méfier tellement de nos intentions, nous sommes sûrement en route
pour le paradis"(p.
755).
Mais l'un après l'autre, suivant leurs responsabilités du moment, les membres
du Comité voient apparaître le décalage entre leurs intentions et les nécessités,
et leur belle conscience morale s'effriter.
- Frannie.
Il faut désigner des volontaires pour espionner Randall, l'Homme Noir (p. 713).
Nick se propose d'envoyer Tom Cullen, retardé mental. Le problème, c'est qu'il
faudrait l'envoyer sous hypnose après l'avoir "programmé”, même s'il court
le risque de se faire torturer par l'autre camp
Frannie réagit : "Vous dites que nous avons tout à gagner et rien
à perdre (...). Et
notre foutue conscience ? Peut-être que ça ne vous dérange pas de penser qu'on
flanque des...des choses sous les ongles de Tom, qu'on lui donne des chocs
électriques. Mais moi, ça me dérange. L'hypnotiser, pour qu'il fonctionne comme...
un poulet quand on lui met la tête dans un sac ! Tu devrais avoir honte"(...). "Vous
ne comprenez donc pas que ça revient à recommencer toute cette merde d'autrefois? (p.
718).
Après avoir voté non, et après discussion, Frannie finit par revenir sur son
vote...
- Stu. Stu se révolte
contre le fait qu'il a dû donner à Tom l'ordre de tuer: "je ne suis
pas d'accord !...on ne peut pas envoyer un pauvre débile se battre pour nous,
on ne peut pas pousser les gens comme des pions sur un putain d'échiquer, on
ne peut pas donner l'ordre de tuer comme un boss de la maffia. Mais je ne sais
pas quoi faire d'autre... Si nous ne découvrons pas ce qu'ils préparent, toute
la Zone Libre risque de s'évaporer un beau jour de printemps dans un énorme
champignon atomique ! (p.
832).
- Larry.
Il est obligé,lui aussi, de faire le contraire de ce que lui dicte se conscience. "Vous
voulez que je vous parle franchement? Je trouve que cette idée pue tellement
que j'ai l'impression de me retrouver dans une vieille pissotière"(p.
719). Mais il finit par voter comme les autres.
Il avait déjà dû transiger sur un autre point: "je n'aime pas tellement
les mystères, les petits trucs en-dessous (...). Cette
catastrophe (...) est
arrivée parce qu'un tas de petits malins voulaient faire leurs petites affaires
en-dessous. (...) De
la pure connerie humaine"(p.
706). Mais quand Mère Abigaël dit que rien ne sera terminé tant qu'un des deux
camps n'aura pas été battu, il déplore: "J'espère qu'elle ne raconte
pas ça à tout le monde"(p.
706).
-
Sue.
Pour éviter "de voir vingt petits copains présenter la candidature
de leurs vingt petits copains, ce qui pourrait tout foutre par terre" il
faut bien que quelqu'un présente à l'Assemblée les candidatures du Comité. "Nous
ne pouvons pas le faire entre nous, évidemment - nous ne voulons pas donner
l'impression d'être une mafia".
Elle propose à chacun "de trouver quelqu'un pour présenter [sa] candidature
et un autre bonhomme pour l'appuyer"(p.
755).
"Ça sent la combine",
dit Sue. Évidemment, faire soi-même ce que l'on craint que les autres fassent...
Et chaque discussion précédant un vote se termine de la même façon: chacun
voit bien les dangers moraux de leurs décisions, mais comment faire autrement?
Quand le danger menace, l'éthique s'efface...On ne peut garder les mains pures:
il faut agir, le péril de mort est obsédant. Et mieux vaut dans ce cas avoir
les mains sales que de ne pas avoir de mains du tout...
On ne peut que se répéter cet argument éculé: "nous espérons simplement
que notre cause est plus juste que certaines de celles pour lesquelles d'autres
hommes politiques ont envoyé des gens se faire tuer"(p.
713).
Et
l'histoire recommence...
La
création d'un Service de la Sûreté Publique montre bien ce qui risque de se
passer (p. 713).
Il y a des désordres à Boulder. Un jeune sans permis fonce à toute allure dans
la rue et se blesse (p. 714): il aurait pu tuer quelqu'un. Un ivrogne casse
des vitrines (p. 795): inutile et on risque de se blesser sur le verre. Un
cocu démolit son rival et sa partenaire (p. 795): on ne peut laisser s'intaller
les voies de fait. Mais il n'y a personne pour faire régner l'ordre.
Il faut bien que quelqu'un fasse ce travail: on désigne Stu, qui proteste: "Je
n'ai pas envie de faire ce foutu travail"(p.
796). Frannie, qui vit avec lui, intervient: "Je voudrais poser une
question. Et si quelqu'un décide de lui faire sauter la tête? - Stu : "je
ne pense pas..."- Frannie : "non, tu ne penses pas.
C'est vrai. Mais qu'est-ce que Nick aura à me répondre si tu te trompes complètement? "Oh,
je suis désolé, Fran!"C'est ça qu'il va me dire? "Ton mec est au
palais de justice. Il a un gros trou dans la tête. J'ai bien peur que nous
ayons commis une erreur" (...). Je
vais bientôt avoir un bébé et
vous voulez que Stu joue les shérifs!"(p.
796).
Il finit par accepter d'être shérif, et essaie de se justifier auprès de Frannie: "Je
sais ce que tu veux pour le bébé...Tu me l'as dit cent fois. Tu veux l'élever
dans un monde qui ne soit pas totalement fou. Tu veux pour lui - pour elle
- un monde sûr. C'est ce que je veux moi aussi (...). Toi
et le bébé sont les deux principales raisons qui m'ont fait dire que j'étais
d'accord"(p.
798).
Stu a beau essayer de se rassurer: "Je ne vois pas pourquoi nous aurions
beaucoup de difficultés. Pour moi, le travail du shérif consiste surtout à
empêcher les gens de se faire du mal"(p.
848), Nick est plus clairvoyant: quand l'électricité sera remise en marche,
combien faudra-t-il "de temps avant que quelqu'un (...) demande
de bricoler une chaise électrique? (p.
884).
Et on en prend vite le chemin: quelques mois plus tard, un nouveau shérif a
fait campagne pour obtenir son poste. Il était "convaincu que la loi
apportait la réponse finale à tous les problèmes"(p.
1174). il a dix-sept hommes sous ses ordres et en demande toujours davantage
à chaque séance du Comité. Il obtient "l'autorisation d'armer ses
hommes"(p.
1178).
"Et ensuite? Quelle est la suite logique? (...) Vous
leur donnez de plus gros calibres. Et des voitures de police"(p.
1175).
"L'éternel combat entre la loi et la liberté individuelle venait de
reprendre"(p.
1178).
Passons sur les créations d'un système judiciaire (p. 797); d'un Comité des
Règles Démocratiques (p. 848): les problèmes seront les mêmes à chaque fois: "La
loi, la loi, qu'est-ce que nous allons en faire? Peine capitale. Charmante
idée"(p.
884).
"La boîte de Pandore? (...). Nous
sommes tous en train de l'ouvrir"(p.
832).
Les citoyens de la zone libre de Boulder.
Des
réactions surtout émotives.
Lors de la première Assemblée Générale, "Tout le monde se mit
debout et les applaudissements grondèrent comme une averse torrentielle (...) Stu
leva les bras, mais la foule en délire ne voulut pas s'arrêter; au contraire,
le bruit redoubla d'intensité"(p.
759). Des hommes et des femmes pleurent (p. 760). On chante l'hymne national
avec émotion, on applaudit les décisions avec enthousiasme (p. 764).
Mais quelques semaines plus tard, "on commença par chanter l'hymne
national, mais la plupart des yeux restèrent secs; l'hymne n'était plus qu'une
partie de ce qui allait être bientôt un rituel. Dans une indifférence générale,
on décida de constituer un comité de recensement"(p.
847).
Sur des questions importantes, comme le choix des représentants de la Communauté, "beaucoup
s'étaient abstenus15, comme
si la question ne les intéressait pas"(p.
923). Quand on leur demande des idées, ils font des "propositions
extravagantes"(p.
848). On discute: "Pour parler, ils le firent pendant les trois heures
qui suivirent (...). Rien
de bien concret ne sortit de la réunion. Quelques propositions plutôt folles (...). Très
peu d'idées pratiques"(p.
926).
Après un attentat qui a fait des victimes, le climat change encore. On réclame
vengeance. "Et ce sont les bons? Ils sont déchaînés, ils ont soif de sang,
ils ne pensent qu'à attraper"les assassins "pour les pendre"(p.
921).
Stu, qui se proposait de convaincre sans contrainte, se voit obligé de parler
de prison et de sanctions: on organisera "un procès, c'est-à-dire
qu'ils pourront donner leur version de l'histoire...Nous sommes censés être
les bons. Nous savons tous où sont les méchants. Si nous sommes les bons, nous
devons nous comporter comme des gens civilisés"(p.
921).
Mais il ne voit autour de lui "que de l'étonnement, de la colère"(p.
921). On n'est pas loin du lynchage...
Un comportement ambigu à l'égard du travail.
S'il y a des volontaires quand le comité le demande, la plupart des habitants
ne font rien: "Une équipe composée essentiellement de femmes s'occupait
de dégager la rue. Une petite foule les regardait faire"(p.
805).
De toute façon, le rendement des volontaires laisse à désirer: "le
problème, c'est qu'ils travaillaient tous sans méthode quand l'envie leur en
prenait"(p.
688). "Comme pour notre travail à la centrale électrique. Nous n'avançons
pas vite parce que nous ne sommes pas organisés"(p.
756). La recherche d'Abigaël disparue se fait dans le désordre, "dans
une confusion indescriptible"(p.
744).
Mais petit à petit les choses s'organisent. "Ils étaient prêts à relever
un défi"(p.
926). Si tous ne travaillent pas, les volontaires le font dans la compréhension
de la tâche et dans la satisfaction. Certains prennent conscience que c'est
pour eux qu'ils travaillent: "Je crois qu'il est plus facile de faire
un sale boulot pour soi que pour quelqu'un d'autre. Certains de ces types,
c'est la première fois qu'ils travaillent pour eux-mêmes"(p.
865).
Les volontaires se trouvent facilement (p. 895). Ils déneigent les routes l'hiver,
ils montent sérieusement la garde (p. 1160). "Il y avait des centaines
de projets en route et d'innombrables volontaires pour lui donner un coup de
main"(p.
1174).
A noter qu'il n'y a pratiquement pas d'opposants, et que les quelques récalcitrants
sont mis au pas ou rejoignent le camp adverse. Mais combien de temps cela durera-t-il?
Ainsi va, cahin-caha, en balbutiant, la fragile démocratie de Boulder...
L'ADVERSAIRE DIONYSIAQUE OU LA DICTATURE.
Le dessein de Randall FLAGG, l'homme Noir, "homme heureux dans la haine"(p. 180), est de réunir "autour de lui une armée (...) qui allait balayer tout l'ouest du pays, réduire en esclavage tous les survivants, d'abord en Amérique, puis dans le reste du monde"(p. 558).
Ses forces humaines.
Son pouvoir s'appuie essentiellement
sur des délinquants choisis, des exclus, des aigris, des esprits négatifs
et des techniciens.
- des délinquants.
Il a ses hommes à lui, hommes de main, assassins, qu'il fascine. Un prisonnier
qu'il vient libérer sentait "une sorte d'extase religieuse. Un immense
plaisir. Le plaisir d'avoir été choisi, élu"(p.
365).
Le style d'une séance de recrutement? A un prisonnier, futur condamné à mort: "Tu
voudrais te venger des types qui t'ont laissé moisir ici, pas vrai?...Pas seulement
ceux-là d'ailleurs, mais tous ceux qui pourraient être capables de faire une
chose pareille?(...). Pour
ces gens-là, un homme comme toi est une ordure. Parce qu'ils ont le pouvoir.
Pour eux, un type comme toi n'a pas le droit de vivre"(p.
364).
- des exclus.
"Il y avait toute une armée d'exclus de l'autre côté des montagnes.
Et lorsque suffisamment d'exclus se réunissent au même endroit, une osmose
mystique se produit et vous devenez membre du groupe. Du groupe où il fait
chaud. Ce n'est qu'une petite chose, d'être à l'intérieur d'un groupe où il
fait chaud, mais en réalité c'est une très grande chose. Peut-être la plus
importante au monde"(p.
938).
"Je suis comme cette bestiole",
pense un rejeté pyromane, objet de la raillerie et des vexations de son entourage;
et il se demande: "Quel était ce monde où Dieu vous laissait tomber
dans un sale merdier comme une bestiole dans une flaque (...) et
vous laissait là vous débattre pendant des heures, peut-être pendant des jours...ou
même, dans son cas, pendant des années. Un monde qui méritait bien de brûler"(p.
289). Quand le pyromane arrive dans le fief de Randall, il est bien accueilli: "Aussi
loin qu'il pouvait se souvenir, c'était la première fois de sa vie que quelqu'un
lui tendait la main. Il était arrivé. Il était accepté. Enfin il n'était plus
rejeté comme il l'avait toujours été"(p.
604).
- des aigris.
On connaissait bien Flagg chez "les révolutionnaires professionnels
et ceux qui ont si bien appris la haine que la haine déforme leur visage (...), que
personne ne veut d'eux si ce n'est leurs semblables, qui les accueillent dans
des chambres minables et décorées de slogans et de posters, dans des sous-sols
où l'on serre des bouts de tuyaux dans des étaux aux mors rembourrés pour les
remplir d'explosifs"(p.
181).
Flagg dispose de réseaux clandestins, qui lui procurent les faux-papiers, les
voitures volées, l'argent dont il peut avoir besoin. "Quand il arrivait
au beau milieu d'une réunion,les bavardages hystériques cessaient tout à coup
- les commérages, les récriminations, les accusations, la rhétorique idéologique"(p.
181). Il les regardait, "le visage flamboyant"(p.
266), et quand la conversation reprenait, "elle était désormais rationnelle
et disciplinée - mais rationnelle et disciplinée comme le pouvaient les fous.
Et c'est alors qu'on décidait les choses"(p.
181).
- des réfléchis négatifs.
Comme ce stirnerien16, qui
écrit dans son journal: "On dit que les deux grands péchés de l'homme
sont l'orgueil et la haine (...). Je
préfère y voir les deux grandes vertus de l'homme. Renoncer à l'orgueil et
la haine, c'est dire que vous voulez changer pour le bien d'autrui. Les cultiver,
leur donner libre cours, est cent fois plus noble, car c'est dire que le monde
doit changer pour votre bien à vous"(p.
882).
- des techniciens.
"La plupart des techniciens vont se retrouver dans son camp (...). Les
techniciens aiment travailler dans une atmosphère très disciplinée, avec des
buts bien précis"(...).
Car si, à Boulder, c'est la confusion, dans le camp de Flagg, "tout
le monde marche au pas de l'oie". "Les
techniciens sont des hommes comme les autres, ils vont aller là où ils se sentiront
chez eux. Notre adversaire veut qu'ils soient aussi nombreux que possible"(p.
647).
Des hommes capables de s'occuper des silos de missiles, des tanks,des hélicoptères,
des bombardiers...
- des soumis.
"La plupart des gens étaient gentils,pas tellement différents
de ceux de Boulder"(...),
mais "parfois d'étranges silences s'installaient parmi eux (...). Ils
obéissaient aux ordres sans poser de questions"(p.
1018).
Ce qui frappe dans ce recensement, c'est la diversité des motivations. Ceux
qui se sont rassemblés autour de Flagg n'ont pas les mêmes perspectives. S'ils
restent obéissants et, en apparence, unis, la raison en est la terreur que
Flagg leur inspire.
Le mode de gouvernement.
"Pendant
que vous méditez sur les beautés de l'ordre constitutionnel, prenez quelques
instants pour méditer sur Randall Flagg, l'homme de l'ouest. Je doute beaucoup
qu'il ait du temps à perdre avec des niaiseries comme les assemblées publiques,
les ratifications et les discussions.au sens démocratique et libéral. Au
lieu de perdre son temps, il s'intéresse à l'essentiel, un monde selon
Darwin"(...): "les
petits sont bouffés par les gros"(p.
839).
Flagg s'est en effet proclamé Chef du Peuple et Premier Citoyen (p. 626). Il
a appelé son régime la "Société du Peuple",
en "l'An Un, année de l'épidémie"(p.
1106). Ses hommes de main le suivent sans hésiter: il est le gagnant. "Il
va faire disparaître vos gens de la surface de la terre"(p.
972).
Si ceux de la Zone de Boulder ont des délicatesses et des scrupules, il n'en
est pas de même pour ceux de Flagg: "l'idée qu'ils puissent avoir
besoin de tribunaux, de prisons, (...) peut-être
même d'un bourreau"tracasse
les gens de Boulder. Mais "l'homme noir ne s'embarrasserait sans doute
pas de tribunaux ou de prisons. Son châtiment serait rapide, sûr, brutal. Il
n'avait pas besoin de prisons pour faire peur aux gens, quand les cadavres
s'aligneraient le long de l'autoroute 15, crucifiés sur des poteaux de téléphone,
offerts aux oiseaux"(p.
667).
La vie dans le société du peuple.
L'électricité fonctionnait, les rues étaient dégagées, plus une trace des dégâts
laissés par les vandales. "Glen avait raison, dit-il. Avec lui [Flagg],
les trains arrivent à l'heure. Mais je me demande si c'est la bonne manière"(p.
1091).
Dans l'autobus, allant au travail, "des hommes et des femmes montaient.
On ne parlait pas beaucoup Et le trajet du retour (...) se
fit dans un silence qui [l'] étonna (...). Pas
de bousculade, presque pas de conversations, rien des habituelles taquineries
entre la vingtaine de femmes et la trentaine d'hommes qui composaient le groupe.
Tous semblaient s'être enfermés dans un monde de silence"(p.
622).
Les gens "travaillaient beaucoup plus dur que ceux de la Zone. Dans
la Zone libre, vous pouviez voir des hommes et des femmes flâner dans les parcs
à toutes les heures de la journée, d'autres prendre trois bonnes heures pour
déjeuner. Ici, il n'en était pas question. De huit heures du matin à cinq heures
de l'après-midi, tout
le monde travaillait"(p.
928).
Le travail est fait, mais pas dans la joie. Flagg "continuait à les
terroriser. S'ils salopaient le boulot et qu'il s'en aperçut, ils n'auraient
plus qu'à faire leurs prières"(p.
947).
Les gens sont obligés d'assister à la crucifixion d'un condamné. "La
foule resta là près d'une heure, chacun craignant d'être le premier à partir.
Le dégoût se lisait sur de nombreux visages, une sorte d'excitation hébétée
sur de nombreux autres (...), mais
s'il existait un dénominateur commun, c'était la peur"(p.
627).
Pas de problème de drogue à l'ouest. Tous savaient quelle était la sanction: "Le
châtiment pour ceux qui désobéissaient à ses ordres était la crucifixion"(p.
950). Celui qui était coupable d'avoir consommé de la drogue était crucifié "pour
le bien de la Société du Peuple, en guise d'avertissement solennel"(p.
627).
La décomposition du système.
"Les gens étaient plutôt gentils, mais ils n'avaient pas beaucoup
d'amour. Ils n'avaient pas le temps, parce qu'ils avaient trop peur. L'amour
ne pousse pas très bien dans un endroit où il fait toujours noir"(p.
1039).
"Ce qui l'effrayait le plus, c'était la façon qu'avaient les gens
de s'éloigner quand vous mentionniez le nom de Flagg, comme s'ils n'avaient
pas entendu. Certains se signaient furtivement ou faisaient le signe qui éloigne
le mauvais 'il. Il était le grand «Celui qui est sans être»"(p.
962). Mais "s'il vous fait peur, c'est peut-être qu'il n'a rien d'autre
à vous donner"(p.
973), leur dit un espion de Boulder, qui pense: "L'Allemagne de 193817. Les
nazis? Oh, ils sont charmants. Très sportifs. Ils ne fréquentent pas les boîtes
de nuit"(p.
968).
Avec la faiblesse fondamentale des régimes totalitaires. "Si c'est
un vrai dictateur, alors il [Flagg] est
peut-être la seule chose qui les unit. S'il n'est plus là, ils commenceront
peut-être à se chamailler et à se battre. S'il meurt, leur organisation s'effondrera
peut-être tout seul"(p.
854).
Les choses n'iront pas jusque là. Dès que Flagg commet des erreurs et montre
des signes de défaillance, les rats fuient le navire en péril. "Ils
abandonnent leur poste et s'enfuient... Vingt hommes partent au travail, ils
reviennent dix-huit. Les gardes-frontières désertent. Ils ont peur que la balance
du pouvoir bascule... Ceux qui restent ne lèveront pas le petit doigt lorsque
ceux de l'est viendront t'achever une fois pour toutes"(p.
1038).
Des exécutions tournent mal. Les gens s'en vont "de plus en plus tous
les jours"(p.
1051). Flagg est mis en cause par une foule qui se rebelle.
On ne saura pas ce que serait devenu ce régime en voie de destruction: un accident
nucléaire provoqué par un sbire trop zélé fait disparaître la Cité du Peuple
(p. 1108).
En guide de conclusion : Dionysos chez Apollon.
La société dionysiaque
axée sur la compétition,la violence,l'agression et l'asservissement est évidemment
insupportable: ce régime qui valorise les comportements extrêmes de certains
dans l'oppression des autres, ce système «militaire»,comme l'appelait Spengler18,
ne peut devenir l'aboutissement de nos sociétés humaines; du moins, c'est
à espérer.
On voit bien en effet que King prend plaisir à montrer, même à accumuler tous
les germes de dégradation qui menacent la société apollinienne de Boulder.
Car les membres du Comité sont de bonne volonté et intègres. "Ils
sont exactement ce que les manuels d'instruction civique nous disent qu'un
bon citoyen doit être: engagés, mais jamais fanatiques; respectueux des faits,
sans jamais vouloir les déformer à leur convenance; mal à l'aise dans un poste
de commandement, mais rarement capables de décliner cette responsabilité si
elle leur est offerte...ou imposée. Dans une démocratie, ce sont les meilleurs
chefs, car ils ne risquent pas d'aimer le pouvoir pour le pouvoir"(p.
630).
Si les membres du Comité ressemblent bien à cette description, ils sont cependant
sensibles au fait que tout pourrait très vite basculer dans l'oligarchie. "C'est
incroyable comme les gens acceptent vos petits secrets. Ça me fait un peu peur (...).Si
nous le voulions, nous pourrions devenir des rois"(p.
896).
La démocratie naissante paraît bien compromise...
La Zone Libre de Boulder va maintenant grandir: comment faire face?
"La démocratie directe - et c'est exactement ce que nous faisons (...) va
très bien fonctionner pendant quelque temps (...). Mais
ensuite nous serons trop nombreux, la plupart des gens qui viendront aux assemblées
viendront pour régler leurs petites affaires à eux, leurs intérêts personnels (...). A
mon avis, nous devrions réfléchir très sérieusement à la manière de transformer
Boulder en république"(p.
794).
Une piste: "retarder autant que possible l'organisation. Car c'est
l'organisation qui semblait toujours être la cause des problèmes (...). Nous
pourrions gagner du temps (...). Suffisamment
de temps pour que cette pauvre terre se recycle un peu. Une saison de repos"(p.
1179).
Une autre piste : peut-être en insistant sur l'éducation?
"Frannie,...crois-tu que les gens apprennent? (...).
Je ne sais pas, dit-elle enfin.
Je ne sais pas"(p.
1179).
Roland Ernould ©
Armentières, novembre 1996, révisé mai 2000.
s.
Notes:
1 THE STAND , écrit en plusieurs années, a été publié dans une version "allégée"en 1978, et dans la monumentale rédaction d'origine en 1990. Cette oeuvre est à la jonction du roman de science-fiction et du roman d'épouvante. Cette étude va complètement négliger l'aspect épouvante.
2 Traduction fr. éd. Jean-Claude Lattès, 1991. Les références de cette étude sont celles de l'éd. Lattès-Grand Livre du Mois en un vol.
3 Voir King , DANSE MACABRE 1981, trad. fr. ANATOMIE DE L'HORREUR, tome 2 PAGES NOIRES , p. 204.
4 EARTH ABIDES, 1948. 1è éd. fr. sous le titre LE PONT DE L'ABÎME , Hachette 1951; 2è éd.fr. LA TERRE DEMEURE , Laffont, Ailleurs et Demain, 1980. Signalons à la fin du livre une étude de Rémi Maure,UN APRÈS LES CENDRES, QUEL PHÉNIX? sur les auteurs ayant traité ce thème. Malheureusement, elle s'arrête en 1978, et King n'y figure donc pas.
5 Cette situation n'est pas sans rappeler les problèmes apparus à la fin de la 2ème guerre mondiale et à laLibération, où il fallait reconstruire et où se posait la question des moyens (entre autres : Anouilh ANTIGONE,1944; Sartre LES MAINS SALES, 1948).
6 Voir DISCOURS SUR L'ORIGINE ET LES FONDEMENTS DE L'INÉGALITÉ ENTRE LES HOMMES, 1755; LE CONTRAT SOCIAL OU PRINCIPES DU DROIT POLITIQUE ,1762.
7 VoirDANSE MACABRE , tr. fr. ANATOMIE DE L'HORREUR , t.2 PAGES NOIRES 1996 , 207. A lire de 202 à 210, pages où King expose certains aspects de l'élaboration de THE STAND .
8 Ces distinctions ont été faites par Ruth Fulton BENEDICT (Ý 1948), dans PATTERNS OF CULTURE , Boston, 1934, tr. fr. ECHANTILLONS DE CIVILISATIONS , Gallimard 1950.Les sociétés apolliniennes.tendent vers la recherche d'un bonheur équilibré et raisonnablement régulé (Apollon est le dieu du soleil, de la beauté et de l'harmonie). Les sociétés dionysiaques (Dionysos représente l'instinct et la violence) sont axées sur la compétition et tendent à promouvoir une personnalité agressive. Le psychisme des individus a des corrélations avec le choix de tel ou tel type de société : ce qui permettrait d'expliquer, dans le roman, le choix des survivants pour tel ou tel camp.
9 Le chiffre (-) indique la p. de l'édition Lattès.
10 AnatoleFrance disait aussi : "Nous n'avons point d'État. Nous n'avons que des administrations", L'ANNEAU D'AMETHYSTE, 1892, chap. 5.
11 King affirme : "he was proud to be an American who believed in the «Declaration of Independance, the Constitution, and even the Articles of Confederation", George Beahm, op.cit., p. 64. Ce qui explique sans doute que le premier souci des pionniers de Boulder est de faire approuver ces textes par leur première assemblée générale
12 Rousseau CONTRAT SOCIAL. op.cit.
13 A l'Université du Maine, King a pu suivre quelques séances de ce genre. Dans PAGES NOIRES , op.cit. , pages 108/109, il raconte que lors d'une réunion en 1968, ayant fait une objection qui lui paraissait pertinente àdes militants Blacks Panthers, il s'était vu tout simplement prié de "s'asseoir et de la boucler". (...). "Ce n'était pas une sensation agréable".
14 Le sociologue du groupe.
15 On connaît la faible participation des citoyens américains aux élections; plus de 50 % n'ont pas voté le 5 novembre 1996.
16 Voir Max Stirner Ý1856, contemporain de Marx, L'UNIQUE ET SA PROPRIÉTÉ , 1844.
17 Dans son inteview à Playboy de1983, King s'inquiète de ce qu'il aurait pu faire sous Hitler: "so, yes, if I had been in Germany in the early thirties, I suppose I might have been attracted to Nazism" cité dans le livre de Georges Beahm THE STEPHEN KING COMPANION .p. 60.
18 Oswald Spengler, Ý 1936, LE DÉCLIN DE L'OCCIDENT ,1918, où il appelle les jeunes générations à abandonner toute rêverie sur le passé et à se vouer joyeusement à l'avenir technique, militaire et césarien, qui est désormais l'avenir de l'Occident.
Mes autres études sur King politique :
1ère partie : ...KING CONTRE LA GUERRE DU VIETNAM : l'homme et le conflit.
2ème partie : KING ET LA GUERRE DU VIETNAM : l'utilisation littéraire du Vietnam. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. dans Désolation et Coeurs perdus en Atlantide. ..
ce texte a été publié dans ma Revue trimestrielle
différentes saisons
saison # 8 - été 2000.
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